Il était une fois un bel hexagone riche de toutes les couleurs, de tous les paysages, de toutes les traditions. Les pays alentour le jalousaient pour tant de dons qui semblaient accordés par les fées… sauf pour l’une de ses traditions qui leur inspirait dérision et compassion.

Bornages et strates archaïques

Cette remarquable contrée restait bloquée par des bornages et des strates archaïques.

Jadis l’antique Gouverneur Central avait dessiné et imposé des frontières internes tout en prenant soin de tenir en ses mains les fils de la toile qu’il avait tissée, contrôlant ses territoires qu’il nomma Département.

Dans chacun d’eux Il plaça des Sous Gouverneurs Centraux que les chef villageois de jadis devait pouvoir rejoindre, en cas de convocation, en une journée à cheval quelles que soient les kilos de mètres.

Les Sous Gouverneurs Centraux voyaient placées sous leur commandement des Sous Sous Gouverneurs Centraux, périmètrés dans des arrondissements au sein des quels ils régentaient les sujets des villes, des villages, des bourgs et des hameaux.

D’empire en révolution, de monarchie en république tout cela finit par ne plus tenir la route. Il fallait faire bouger les lignes, mais les subtils Architechnarques Centraux, chargés de trouver les remèdes, aggravèrent les maux.

Architechnarco structures

C’est ainsi qu’en quelques décennies il fut décidé de coiffer les villes et les villages de Communautés de villes et de villages. Les départements virent s’installer au dessus d’eux des Conseils Régionaux. Aucune de ces collectivités et super collectivités n’avait de vrai pouvoir, plein et entier. Chacune construisit ses murailles et ses ponts levis. Chacune créa et multiplia d’indolentes armées de fonctionnaires chargées de montrer à l’autre sa puissance et sa force…les sujets payaient.

Tout enfla, tout se boursoufla, tout s’embrouilla.

Plus aucune chatte n’y retrouva ses petits, ni la centrale, héritière des Gouverneurs défunts, ni les locales, héritières des Sous Gouverneurs.

Inspirés par des Ènarchonautes à la formation perverse, aucun homme ni aucune femme de pouvoir ne réussit à mettre fin à ces désordres. Chaque fois qu’on y touchait on alourdissait en l’embrouillant la complexe architecture.

Vivent les pâtissiers !

Tout cela fit le bonheur de la corporation pâtissière qui, observant la funeste ingéniosité des élites, s’en amusa en créant l’un des fleurons de sa production, le célèbre Mille Feuille :

une couche pour les communes,

une couche pour les communautés de communes,

une couche pour les « pays »,

une couche pour les eurodistricts,

une couche pour les eurométropoles,

une couche pour les arrondissements,

une couche pour les départements,

une couche pour les comités économiques,

une couche pour les régions.

Il y eut ainsi de la crème pâtissière montée parfois jusqu’en neuf couches superposées.

Un Maire connu pour ses audaces culturelles avant gardistes n’hésita pas à proposer cet extraordinaire Mille Feuille (et quelques autres cumuls) au patrimoine mondial de l’UNESCO ainsi qu’au prix Marcel Duchamp.

Mais ces distractions furent l’ultime cerise sur un gâteau de plus en plus indigeste.

Le bel Hexagone allait-il crouler sous le poids de ses couches pâtissières en même temps que sous les risées de ses voisins ?

Il fallait réagir, simplifier ces strates, prendre les bornes par les cornes.

Richerix, Kennelobix et Buttneromix

Or depuis quelque temps l’Hexagone était envahi du nord au sud, d’ouest en est, de haut en bas, couche par couche, strate par strate par une armée hollandiste dominatrice et auto bloquante.

Tout l’hexagone envahi? Non ! Car une région peuplée d'irréductibles Alsaciens résistait encore et toujours.

Leur chef, Richertérix décida de lancer l’offensive :

« Peuples d’Alsace unissons nos forces, rendons digeste le Millefeuille. Réduisons ses couches de crème. Créons une belle pièce que tout l’hexagone va nous envier! »

Son flacon de potion magique à la ceinture, il palabra des heures et des heures, des mois et des mois avec les chefs de toutes les tribus alsaciennes.

Kennelobix le chef du nord fut rapidement convaincu. Buttneromix le druide du sud consulta longuement ses haruspices, posa de nombreuses clauses de sauvegarde et quelques chicanes mais finit par signer sur l’essentiel.

Une fumée blanche s’éleva avec grâce de la cheminée de l’Altus Koenigsburgus et un cri unanime retentit dans toute la plaine d’Alsace : 

« référendum…référendum…alléluia…référendum !»

En avant ! Simplifions notre Mille Fladen »

L’Alsace était prête et d’une voix forte et unie Richertérix, Kennelobix, Buttneromix proposèrent à toutes les peuplades d’Alsace de chanter en chœur et en mode canon:

« Unissons nos voix pour une Alsace forte

Ensemble relions nos places fortes

Simplifions notre Mille Fladen

Multiplions nos ponts sur le Landgraben

A l’avenir ouvrons grandes nos portes »

 L’envahisseur hollandiste en fut stupéfait et, chagrin, ne réussit à trouver la moindre parade cohérente. Certains parmi les siens décidèrent de participer à la chorale, d’autres de se murer dans un silence mélodieux, d’autres enfin de se proclamer Nonistes.

Et le septième jour du mois d’avril de l’an de grâce 2013 les alsaciens firent sonner les trompettes de leur renommée en ouvrant une ère nouvelle dans l’admiration étonnée de tout l’hexagone et des pays alentour.

 Assurancetourix