Malédictions architecturales, la façade du Printemps à Strasbourg

Tribune In « Les Dernières Nouvelles d’Alsace » 29 Juillet 2010

Qu’il faille enfin changer et embellir la façade du Printemps est une évidence, mais de là à faire tomber la foudre sur le quartier, fut-ce en aluminium couleur champagne, il y a un pas qu’il ne faut pas franchir…

Or les DNA du 23 juillet nous montrent une image du projet que le magasin Printemps veut infliger à Strasbourg et aux Strasbourgeois. Facebook montre une maquette blanche. Il y manque la couleur faux bronze mais vrai blilng bling qui devrait enluminer cette chose en accentuant ses excès.

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Le bâtiment du Printemps, si longtemps négligé par ses propriétaires et dirigeants successifs, est situé dans un des endroits les plus sensibles du cœur de la ville.

A deux pas de la soucoupe qui coiffe ce nœud de tensions inquiétant que constitue la station du tram, à un jet de pierre de la tour qui est tant décriée, à deux encablures du ratage de la maison rouge qui défigure toute la place Kléber, ce quartier doit-il être définitivement l’objet de malédictions architecturales et constituer le catalogue du mauvais gout et des ratages de notre ville ?

J’estime en effet que la façade actuellement imaginée décrocherait le pompon en matière de misère esthétique.

Mon premier reflexe devant ces stries géantes en métal artificiellement bronzé, de type champagne bling bling, a été un choc. J’ai ressenti une agression visuelle.

Il ne faut, en effet, pas juger à l’échelle de la maquette mais imaginer le résultat en grandeur réelle.

Ce projet de façade me semble avant tout violent et d’un parfait mauvais gout néo kitsch, style stand géant de messti de province.

Si ces immenses raies de métal jetées sur la façade avec une disharmonie totale devaient signifier une sorte de modernité post cubiste, elles suggèrent avant tout un désordre structurel, mais non artistique pour autant, qui agressera les regard.

Si elles devaient suggérer un drapé ( !) rappelant ceux des exceptionnelles sculptures classiques, ou celui des rideaux de scènes, il serait plutôt mité. Mais c’est avant tout un rideau guerrier de forteresse qu’elles évoquent.

Aucune élégance, aucune classe mais une parodie sommaire d’art concret décadent et mal digéré.

Ce lieu, ce bâtiment appellent l’élégance, l’harmonie, la douceur et le calme architectural.

Une telle façade devrait suggérer le désir plutôt que l’inquiétude.

Elle devrait être harmonieuse et apaisée au milieu de tant de désordres.

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Cette façade n’est pas de l’affaire privée d’un groupe international situé à Paris, c’est l’affaire de tous les strasbourgeois à qui ce projet appartient moralement.

Dans le but d’éviter une tache qui risquerait de marquer Strasbourg pour longtemps il est encore temps de proposer un concours d’architectes et de confronter plusieurs projets car au fond, ni le conseil de quartier, ni l’architecte des bâtiments de France n’ont eu le choix.