Au cours de la réunion du conseil municipal du 23 janvier 2012 il a été longuement question de la création d’une antenne de l’association ANTICOR à Strasbourg.

 Cette association – en clair « anticor-ruption » – se mettait en place au sein même de notre conseil municipal. 

 De facto et sans la moindre indication quant à ses objectifs précis, cette association de lutte contre la corruption jetait doute et suspicion sur l’ensemble des élus locaux. Certains n’hésiteront pas en effet à penser et à dire que si une association anti-corruption estime nécessaire de se constituer à Strasbourg, c’est peut-être qu’il y a quelque chose à creuser…

 Dès lors je suis intervenu au cours de cette séance pour défendre l’honneur et la respectabilité des élus.

 Depuis nous avons appris que la justice avait été saisie à propos de marchés passés dans l’affaire Bamako et nous comprenons à posteriori que la création d’Anticor67 avait, selon ses fondateurs, un but ciblé.

 Le 23 janvier personne n’en était informé : ni le public ni les élus du conseil municipal.

 Malgré les questions insistantes qui avaient été posées en ce sens, aucun membre d’Anticor67 n’a voulu apporter la moindre précision quant à ses buts réels et à l’opportunité de cette création.

 Face une réelle incompréhension, nous étions fondés à penser que cette association de lutte contre la corruption visait l’ensemble des « politiques ».

 Jeter une telle suspicion est insupportable et pour le manifester j’ai employé des termes vigoureux qui ont pu choquer les membres d’anticor.

 Ainsi ai-je parlé, à leur propos, de « petite secte » et indiqué en substance que le procédé revenait à «  servir les plats au FN ».

 Cette liberté de ton, et plus généralement la liberté d’expression des élus est l’un des apanages les plus précieux de la Démocratie. 

 La Cour Européenne des Droits de l’Homme y veille tout particulièrement et l’a encore rappelé le 12 avril 2012, estimant qu’il n’y a « guère de place pour des restrictions à la liberté d’expression dans le domaine du discours politique ou des questions d’intérêt général. » 

 Selon la Cour « dans ce domaine, l’invective politique déborde souvent (… ) ce sont les aléas du jeu politique et du libre débats d’idées, garants d’une société démocratique. » ( CEDH, 12 avr. 2012 n° 54216/09 De Lesquen Du Plessis-Casso c/ France )

Il est des lieux et des débats où la parole doit être, par essence, libre. Tel est le cas du  Conseil municipal et de ce qui peut y être dit en réunion.

 En effet, toujours selon la CEDH, « si les déclarations du requérant n’étaient pas couvertes par une quelconque immunité parlementaire, elles ont été prononcées dans une instance ( conseil municipal ) pour le moins comparable au parlement pour ce qui est de l’intérêt que présente pour la société, la protection de la liberté d’expression ; or dans une démocratie, le parlement ou des organes comparables sont des tribunes indispensables au débat politique et une ingérence dans la liberté d’expression exercée dans le cadre de ces organes ne se justifie que pour des motifs impérieux. »

 J’ajoute que cette décision du plus haut tribunal européen concernait des propos visant l’affaire des marchés publics d’Ile-de-France et que l’association Anticor ne peut donc que la connaître…

 Ceci-étant dit, il arrive que cette précieuse liberté s’exprime précisément par des expressions, des invectives ou des termes qui, sortis du discours et du débat d’opinions, peuvent heurter la sensibilité des uns ou des autres.

 Les mots « petite secte » ont ainsi particulièrement retenu l’attention de l’association Anticor.

 Je retire ce terme s’il a pu les blesser, ce n’était pas le but poursuivi.

 En ce qui concerne l’expression «  servir les plats au FN » je tiens à rappeler que le parti des Le Pen ne cesse de jeter la suspicion sur l’ensemble de ce qu’il appelle avec mépris "la classe politique".

 " Tous pourris ! " est un des slogans du Front national tout comme " tête haute et mains propres ! ".

 Ceux, par conséquent qui, sans exemple précis, évoquent une sorte de corruption anonyme gangrénant l’ensemble des élus du peuple peuvent donner l’impression qu’ils approuvent le parti qui s’autoproclame « mains propres, contre les tous pourris»

 C’est bien ainsi qu’est apparu, dans un premier temps, l’apparition d’Anticor à Strasbourg.

 Dès lors, face à ce type de dénigrement les élus ne peuvent se contenter d’opposer un silence digne et la réaction peut parfois être vive.

 J’ai pris connaissance de façon plus approfondie des objectifs, du travail et des intentions exprimées par l’association Anticor qui explique s’être constitué en 2002 en réaction face aux thèses du front National.  Il n’y a plus de méprise possible sur cette question qui aurait mérité d’être exposée plus tôt avec les raisons réelles de l’installation d’une antenne Anticor à Strasbourg.

 Je veux donc bien prendre en considération que l’association  Anticor, proche de M. Montebourg du PS, n’ait pas pour objectif de « servir les plats au FN » mais il lui faudra alors prendre en considération que l’immense majorité des élus républicains est au service de ses concitoyens avec le sens de l’honneur et de l’éthique.

 La liberté d’association et la liberté d’expression pourraient utilement se rejoindre sur ce point.