On savait l’UMP mal en point après la mère de toutes les défaites qui vint couronner les autres sans aucune exception.

On pouvait regarder sévèrement l’éclatement de son unité factice avec la demi douzaine de prétendants à sa présidence.

Mais le point d’orgue cacophonique vient d’être atteint avec la proclamation de quelque onze anonymes secrétaires nationaux de ce mouvement. Il manque un douzième… (Le Monde.fr | 16.08.2012)

Ils s’offrent avec une insolente transparence avec ce cri pathétique « On ne veut pas rester dans l’opposition pendant dix ans». En clair, « on veut les places parce qu’on est jeune»

Au nom de quelles compétences ? L’état civil !

Au nom de quel projet ? Plus tard !

Avec quelles idées ? Aux autres de dire les leurs, nous on est jeunes !

Ringardise

Comment pourrais je ne pas réagir à deux titres ?

1) J’ai été leader d’un mouvement de jeunes qui a laissé sa trace dans l’histoire et qui ne cessait de développer projets et idées nouvelles. Mais, surtout, il était guidé par un idéal, mot aujourd’hui banni du vocabulaire politique.

2) La défaite de Strasbourg est dénoncée par nos jeunes prodiges qui estiment que si notre ville est passée à gauche ce serait à mettre sur le compte de la ringardise.(1)

Le bilan de la municipalité Fabienne Keller - Robert Grossmann a été d’une ampleur et d’une modernité sans égales, paradoxalement salué par près de 75% des strasbourgeois.

Le mode de gouvernance quant à lui fut d’une audace nouvelle: la partage de toutes les responsabilités entre maire et président de la communauté urbaine. En avance sur son temps ? Initié par notre équipe ce modèle fait école depuis.

Ce n'était certainement pas dans la ringardise qu'il fallait voir les causes de la défaite comme celle des 200 autres villes passées de droite à gauche, comme 99% des Départements et des Régions. Mais, la ringardise, on peut en effet voir à l’œuvre, dans d’autres camps, ceux du palabre stérile et, à d’autres niveaux générationnels, ceux des carriéristes ! C’est si ringard, des dents qui rayent les parquets !

 

Dans l’apparition aoutienne de nos jeunes impatients, un autre credo est pittoresque de pathétique : "On ne veut pas que ce soient les responsables des défaites des dernières années qui viennent nous dire ce qu'il faut faire". Ça fera du monde à virer et aux plus hauts niveaux…

L’histoire nous a pourtant démontré que ceux qui savaient tirer les enseignements de leur défaite et se relever étaient plus forts et mieux armés pour la reconquête. Mitterrand, Chirac, s’il ne fallait en citer que deux, sont des exemples éloquents de battus, rebattus puis élus.

Récurrente juventomanie auto proclamée

« le temps ne fait rien à l’affaire »

Mais selon le catéchisme de nos imprécateurs, seuls les jeunes seraient en mesure de gagner et gouverner. De Gaulle, Churchill, Adenauer : relégués au rang des obsolètes pour cause d’âge…Chirac 2 itou !

Périodiquement surgit ce genre de prurit, on se souviendra de l’équipée des 12 «quadras» - 6 UDF et 6 RPR- de 1989, lançant l’opération «rénovateurs», qui devait changer la face de la droite en remédiant à ses divisions. Villiers, d’Aubert, Noir, Carignon, Bayrou, entre autres.

Le club des quadras a vécu le temps d’un été et chacun s’en est allé à son destin !

 

Le fait d’ériger l’état civil en stratégie électorale méconnait un autre facteur essentiel: les électeurs ! En prolongeant le raisonnement de nos juventomaniaques il faudrait ne prendre en compte que les voix des jeunes et écarter les électeurs âgés qu’ils récusent comme candidats.

Faut-il qu’ils soient sûrs de leur fait en imaginant que nos concitoyens ne voteraient que pour une fiche d’état civil. Je ne peux m’empêcher en les lisant de fredonner Brassens : « Le temps ne fait rien à l’affaire…. »

Les pantoufles de l’ambition personnelle

Ce qu’on attendrait de ces jeunes, ce sont des idées jeunes, un projet jeune, des propositions jeunes, plutôt que l’affirmation arrogante du primat de l’état civil.

 

Il y a tant de jeunes qui ont chaussé leurs pantoufles et chacun voit bien aussi des vieux qui ont, chevillés au corps, l’énergie, le sens de l’innovation et la capacité de se remettre en cause qui sont les vrais signes de la jeunesse, celle de l’âme et de l’intelligence.

René Char : On ne devient pas vieux pour avoir vécu un certain nombre d’années: on devient vieux parce qu’on a déserté son idéal. Les années rident la peau, renoncer à son idéal ride l’âme.

 

Nos jeunes secrétaires nationaux de l'UMP ont cru bon de dispenser leurs leçons. Ils veulent en finir avec la guerre des chefs et nous livrent un pitoyable plaidoyer pour être chefs. 

 

Ils ont fait «un coup médiatique», un coup de plus, qui ne peut que détourner les sympathies de nos concitoyens de cette UMP qu'ils prétendent défendre.

 

Vivement qu'on en sorte et qu'on renoue avec les fondamentaux que le gaullisme nous a légué par delà les clivages partisans. 

 

 

(1) « Les membres du collectif sont issus pour la plupart de territoires urbanisés et disent ne pas vouloir se résoudre "à la défaite dans des villes comme Strasbourg, Nantes ou Paris". Pour les conquérir, ils veulent "que l'UMP cesse d'être perçue comme ringarde sur certains sujets ». (Le Monde.fr | 16.08.2012)

 

(2) « La réforme suppose surtout, à leurs yeux, de faire de la place "à la nouvelle génération". "On ne veut pas que ce soient les responsables des défaites des dernières années qui viennent nous dire ce qu'il faut faire", ont-ils affirmé. » (Le Monde.fr | 16.08.2012)