Je souhaiterais pouvoir expliquer, justifier et faire partager notre prise de position concernant la fermeture de Fessenheim.

Tout d’abord nous voulons affirmer que nous ne sommes pas favorables à condamner l’énergie nucléaire qui est aujourd’hui nécessaire à la France et qui assure son indépendance énergétique.

Toutefois le nucléaire représente un danger potentiel majeur qui hélas a été illustré par la tragédie de Tchernobyl et maintenant par celle de Fukushima.

 

Constatons d’abord, tous ensemble, qu’il n’est plus jamais possible de dire qu’avec le nucléaire il n’y a aucun danger. C’est pourtant ce que vient de faire par affirmations gratuites, de type méthode Coué, le directeur d’EDF dans les DNA du 14 avril. Il l’a fait avant que les expertises prévues à cet effet n’aient eues lieu.

Fessenheim a été construit selon les experts de l’époque pour une durée de 30 ans.

La centrale est donc dans sa trente quatrième année de fonctionnement. Or les normes de sécurité étaient vraisemblablement moins contraignantes dans les années 1970 qu’aujourd’hui, surtout après Tchernobyl.

Sa durée de vie est achevée.

 

Il convient d’ajouter que la centrale alsacienne est située sur une faille sismique qui avait produit un tremblement de terre au XIVème siècle à Bâle qui a duré une année entière que les experts français évaluent à 6,2 ….et les experts allemands et suisses à 6,7 / 6,9.  Ils viennent de réévaluer ce chiffre en le portant à 7,2

Or, entre les valeurs 6,2 et 6,7 de l'échelle de Richter, la magnitude d'un séisme est multipliée par 5 et la puissance multipliée par 15.

La ville de Bâle a été anéantie le 18 octobre 1356 et de nombreuses destructions sur une vaste région s'étendant à la France et à l'Allemagne eurent lieu. Il fut ressenti à une très grande distance (Zurich, Constance et même jusqu'en Île-de-France).

Le nombre de morts est estimé à 300 dans la seule ville de Bâle.

Et il n’y avait pas de centrale nucléaire.

 

La ministre Kosciusko Morizet a annoncé que pour Fessenheim, je cite : « on prend en compte le dernier tremblement de terre connu sur la zone, en l'occurrence celui de Bâle en 1356. Il a été évalué à 6,2 sur l'échelle de Richter. On a pris une marge de 0,5. Fessenheim est donc conçu pour résister à un séisme de 6,7. »

Typisch Französich comme diraient nos amis allemands.

En ce qui me concerne je préfère prendre en compte les calculs des allemands et des suisses qui sont concernés au premier chef par l’événement historique de Bale.

De plus il faut noter que pour notre centrale, l'Autorité de sûreté nucléaire, la fameuse ASN a pointé une absence de mises aux normes sismiques. Celle-ci coûterait des centaines de millions d'euros. Or malgré les propos lénifiants de son directeur, EDF, depuis sa privatisation, tire sur les coûts, impose des arrêts de tranche pour maintenance de plus en plus courts et utilise des sous-traitants moins bien formés à la sûreté.

Le bons sens impose donc que l’on ne joue pas avec le feu nucléaire.

 

Le fameux principe de précaution que l’état oppose à tous les responsables locaux pour une prévision météorologique, une non conformité de salle de spectacle, une solidité de tribune sportive doit donc s’appliquer à plus forte raison à une centrale nucléaire.

Ce devrait être le « super principe de super précaution » qui s’applique en l’espèce.

Dès lors la fermeture s’impose.

Or nous apprenons que pour des raisons de couts financiers EDF veut la prolonger jusqu’à 60 ans et le célèbre monsieur Proglio, celui qui avait lutté douloureusement pour conserver son double salaire « Véolia-EDF » mais qui ne gagne plus à EDF que 2,05 millions d’Euros soit 117 smic , a affirmé que détruire une centrale nucléaire c’est comme détruire un immeuble de l’époque Haussmannienne. En clair on pourrait donc les garder 160 ans !

 

Pourtant si une telle fermeture-démantellement était bien une première en France,  de toute petites unités nucléaires ont été démantelées, même si elles ne peuvent constituer une préfiguration de démantèlement d’une centrale de type Fessenheim. On peut néanmoins citer  

le réacteur à neutrons rapides et caloporteur sodium Superphénix de la centrale nucléaire de Creys-Malville,

les 3 réacteurs les plus anciens de la centrale nucléaire de Chinon 

les 2 anciens réacteurs de la centrale nucléaire de Saint-Laurent, 

le premier réacteur de la centrale nucléaire du Bugey,

le premier réacteur de la centrale nucléaire de Chooz.

Il est important de signaler que la durée du démantèlement d'une centrale est aujourd'hui estimée à 30 ans (de l'arrêt du réacteur à la remise du site à l'état initial).

Sait-on que Tchernobyl brûle toujours ce qui signifie que l’on n’a pas encore totalement maîtrisé le processus de refroidissement et d’extinction définitif.

Les ruines du réacteur 4 resteront radioactives pendant les siècles, (voire les millénaires) à venir. Le plutonium 239, qui est l'un des éléments radioactifs présents à l'intérieur du réacteur, a une demi-vie égale à 24 000 ans.

Aujourd'hui, le réacteur est emprisonné dans un sarcophage de béton bardé d'acier et bourré de 300 000 tonnes de sable, d'argile, de plomb et de bore. Il nécessite une surveillance constante

Lorsque nous demandons la fermeture de Fessenheim ce n’est pas à effet immédiat mais dans des délais brefs et par ailleurs cette fermeture serait le signal le plus fort possible de la mise en route rapide de recherches efficaces d’énergies nouvelles, renouvelables.

C’est à notre initiative qu’a été inséré la phrase : « quelles que soient les conclusions de la commission d’enquête… ».

En effet nous pouvons dire par avance que ces conclusions vont être positives avec la même crédibilité que l’info qui décrétait à l’époque que le nuage de Tchernobyl s’était arrêté à la frontière franco allemande, et c’étaient bien des experts qui s’étaient alors prononcés. L’Autorité de Sureté Nucléaire est solidaire d’EDF, la soutient et la justifie alors que d’autres experts estiment qu’EDF bidouille les chiffres et minimise les analyses sismiques.

On ne peut pas accorder confiance à ces experts chargés de rassurer les populations et malheureusement un élément factuel vient de nous donner raison par avance. En effet la troisième visite décennale réalisée sous le contrôle de cette Autorité de sûreté nucléaire (ASN) aura lieu ce lundi. Or l’on sait déjà que les trois générateurs de vapeur de cette unité de production seront remplacés, ce qui signifie que la décision de poursuivre son exploitation est prise avant même les conclusion de l’expertise annoncé pour juin. M. Machenaud ont même évoqué je cite « le plaisir de la prolonger jusqu’à 60 ans »

 

Un mot de politique maintenant.

Je veux dire à tous nos amis qui ont marqué un certain étonnement face à notre prise de position, que celle ci est le fruit de convictions dictées par notre conscience et nous voulons être en accord avec nos consciences.

Nous pouvons comprendre qu’un membre du gouvernement ne peut pas prendre n’importe quelle position, mais des élus, conseillers, régionaux, généraux eux, ont le droit d’interroger leur conscience et se mettre en accord avec elle.

 

Au fond il s’agit de défendre la Vie tout court et il n’y a pas de plus belle position humaniste que celle qui consiste à mettre ses actes en conformité avec ses paroles au service de nos semblables.

 

Aussi je souhaite prévenir ceux qui auraient été surpris de notre engagement sur Fessenheim que nous aimerions poursuivre notre engagement dans le sens de la défense de l’écologie.

Dès à présent nos conseils pourraient réfléchir à une prise de position forte en faveur de l’abandon définitif et non pas temporaire de la prospection du gaz de schiste en Alsace.

Mes chers collègues, il y a incontestablement un danger potentiel dramatiquement grave qui pèse sur notre Région et sur toutes les régions voisines, allemandes et suisses, il est de notre devoir de mettre en application le principe de « super précaution » et de voter à l’unanimité pour la fermeture de Fessenheim