restitution des assises de la culture par le maire: mon analyse
Par Robert Grossmann le mardi, 10 novembre 2009, 07:35 - Strasbourg - Lien permanent
Adresse au maire de Strasbourg
Vous avez présenté samedi la restitution des assises de la culture…au Palais des fêtes toujours en attente de réhabilitation.
Vous y avez fait des annonces et je vous remercie d’accepter que je vous donne mon point de vue.
Premier commentaire : la plupart des annonces que vous avez faites n’ont jamais été évoquées dans les ateliers qui débattaient pendant six mois.
Beaucoup d’acteurs de la vie culturelle se sont donc sentis quelques peu étonnés, d’autres se sont senti floués.
M. le maire, vous m’avez répété ce lundi à quatre reprises que vous avez été longuement applaudi et vous avez exprimé votre contentement.
Je sais que beaucoup auraient aimé un dialogue plus direct, plus franc avec moins de mise en scène ce qui contraignait le débat. Beaucoup aussi étaient étonnés que l’adjoint à l’animation soit aussi visiblement mis en scène : la culture c’est un peu différent de « l’animation » car elle va au delà et elle est porteuse de sens
Dans cette importante étape de votre plan média, qu’apprenons nous d’entrée en guise de résultat concret?
Que vous allez lancer une deuxième étape !
Vous allez donc, d’assises en assises, faire asseoir la culture à Strasbourg en un « processus au long cours » …d’assoupissement vacuitaire…. En étant vigilant on pourrait craindre en effet une opération d’endormissement.
Votre slogan pour ces assises est : « Parlons culture »
Monsieur le maire : la culture se vit, elle est action, elle doit être agissante.
Vous, qui aimez la littérature, vous connaissez ce cri en forme de mot d’ordre du Faust de Goethe :
« au commencement était le verbe, non au commencement était l’action »
Vous…vous êtes dans le verbe et le verbe se délite en blablabla que vous persistez à appeler de ce nom totalement démonétisé à force d’utilisation abusive et donc d’usure : « démocratie participative », qui n’est plus qu’une démocratie blablative.
*Vos annonces de restitution et donc d’orientations, commencent par : « une bonne gestion ». Monsieur le maire je ne pense pas qu’en 18 mois de magistrature Ries elle ait été mauvaise…
*Ensuite vous voulez assurer le rayonnement de Strasbourg par la culture. Il ne me semblait pas compromis… avec notre Orchestre Philharmonique et son chef prestigieux, notre Opéra à grand rayonnement, le Zénith, le CEAAC, le Maillon, le TJP, Musica, nos Musées exceptionnels, et je ne fais pas de catalogue ce sera pour une autre fois
*Vous voulez que « la culture aille partout ». Nous sommes pleinement d’accord et permettez moi de vous rappeler que nous même avions innové en installant des artistes au Neuhof cité, en ayant même un chargé de mission culture pour le Neuhof et nous avons mis en chantier un centre culturel au Neuhof. Je souhaite aussi rappeler qu’ il y a le Maillon-Hautepierre pour le quel nous avions en projet dès l’achèvement des travaux de mettre en œuvre une belle synergie entre les Percussions de Strasbourg et le Théâtre du maillon. Où en êtes vous sur ce plan ?
Je souhaiterais aussi rappeler que nous avions mis l’orchestre Philharmonique à la Canardière pendant deux à trois ans et nous avons amené les habitants de Koenigshoffen à l’Opéra. Peut-être savez vous aussi que des écoles maternelles de Neuhof cité allaient avec les parents au musée d’art moderne contemporain pour y travailler.
Nous sommes donc en plein accord avec vous sur ce plan mais nous attendons des actes.
*Vous voulez tendre la main aux jeunes. Très bonne idée qui s’inscrit dans la continuité de ce que nous avons fait car ce sont bien les jeunes qui fréquentent le Zénith, la Laiterie, Molodoï, l’Abreuvoir et le TJP et je ne suis pas exhaustif.
En suivant le plan de votre exposé je tombe sur une annonce importante qui n’a été concertée avec personne, ni dans les ateliers de vos assises, ni avec un conseil de quartier ni avec personne d’ailleurs, c’est l’idée de mettre un futur opéra le long du Rhin.
Donc vous voulez l’éloigner du centre de Strasbourg pour le placer à coté de Kehl…et vous comptez sur des partenariats allemands et suisses !
Vous avez décidément l’eurodistriçite aigüe.
Monsieur le maire permettez moi de vous dire qu’il s’agit là d’une erreur, ne la commettez pas.
Et puisque vous ne vous êtes concerté avec personne pour l’instant je vous suggère de faire une enquête d’opinion auprès des tous les abonnés et les spectateurs de l’actuel opéra et nous aurons une bonne idée de ce qui est souhaité et souhaitable.
Par ailleurs, vous connaissez le rayonnement et le succès mondial du Festspiel haus de Baden Baden. Le pays de Bade et nos voisins allemands sont donc très bien servis en ce domaine et pour faire jeu égal avec Baden il faudra des moyens colossaux, je vous souhaite de les trouver.
Toutefois je souligne que vous évoquez un délai de 10 ans pour ce futur Opéra et d’ici là beaucoup d’eau va couler sous la passerelle des deux rives…Mais, monsieur le maire pendant ce temps place Broglie ce sera toujours l’insécurité et l’inconfort dans l’actuel bâtiment du théâtre municipal.
Vous savez, parfois il faut aussi savoir décider !
* Vous évoquez ensuite la presqu’île Malraux où vous proposez des ateliers d’artistes. Mais j’ai cru avoir lu tout à fait autre chose dans les DNA du 14 aout concernant la SERS qui allait lancer des appels à projets sur ce site : on y lit : « sont attendus restaurants, bars, discothèques, galeries d’art, bureaux services locaux professionnels résidences hôtelières commerces alternatifs à vocation culturelle, enseigne exclusive branchée sur la culture et les loisirs, piscine flottante et autres structures aquatique, l’ensemble devant former un lieu générateur de vie. »
Mais d’ateliers d’artistes point !
On ne sait plus très bien ce qu’il en est et je vous serais reconnaissant de bien vouloir nous éclairer à ce sujet
Vous voulez aussi que les jeunes désertent la rotonde et le skate park à succès que nous y avons réalisé, à coté de la patinoire et du nouveau centre sportif.
Incompréhension …
*Vous voulez « opérer des rapprochements » entre l’OPS et l’Opéra monsieur le maire, c’est fait et il y a même des conventions qui les lient. La seule chose que vous pourriez faire de plus, à la suite de votre annonce directive, c’est imposer une gestion unique, mais, bonjour la démarche !
*Quant au rapprochement entre le musée Alsacien et le musée historique c’est assez bizarre. Ces deux musées ont des sens très différents même si « tout est dans tout ». Ils pourraient aussi, pourquoi pas, se compléter également avec le musée archéologique, et le musée de l’œuvre Notre Dame…Il serait intéressant que vous acceptiez de nous dire quel but vous recherchez avec « ce rapprochement » et comment il peut se réaliser concrètement ?
*Avec toute l’autorité de votre fonction de maire vous invitez… le Maillon, les TAPS, l’OPS, et l’Opéra, à travailler ensemble et, je vous cite, « avec le tissus dense des compagnies présentes et actives sur place ».
Qu’est ce que cela veut dire de manière concrète?
De plus vous imposez au TAPS une nouvelle ligne artistique…en évoquant un retour à ce que vous appelez la vocation originelle du Scala, bref, la vôtre d’avant nous… l’originel c’est vous.
Attention de ne pas porter atteinte à l’architecture du spectacle vivant à Strasbourg et en Alsace.
Les TAPS tels qu’ils fonctionnent permettent des programmations de compagnies strasbourgeoises et régionales qui, sans eux, seraient quasiment menacés dans leur diffusion et donc leur création. Permettez moi de vous expliquer que les TAPS sont issus d’une longue concertation avec l’ensemble des acteurs du spectacle vivant et que ce ne fut jamais le fait du prince de les constituer ainsi.
Votre vieille idée d’honorer la langue régionale et les identités régionales trouve dores et déjà sa concrétisation dans le Théâtre Alsacien, la Choucrouterie et, je veux le dire aussi fortement, cette idée est portée avec un grand succès par des artistes comme Huguette Dreikaus qui remplit les salles partout où elle se produit.
Je ne crois pas que ce changement de cap ait été le fruit d’une concertation et soit sorti des ateliers des assises. De grâce ne touchez pas aux TAPS pour céder à des amicales pressions et faire plaisir….
Puisque j’en suis à livrer mes réflexions sur la culture à Strasbourg je souhaiterais si vous m’y autorisez, aborder un sujet plus délicat. Sachez qu’il y a de grandes interrogations dans le monde culturel sur le thème : où se trouve le lieu et le centre de décisions.
En effet entre vous, le patron, qui avez pris les choses culturelles en main,
· l’ancienne ministre de la culture toujours attentive à ces choses là, votre premier adjoint que vous avez fait nommer au conseil ou à la commission de l’Opéra,
· l’adjoint chargé des animations,
· l’adjoint à la culture,
· le conseiller culturel que vous avez recruté à votre cabinet,
· des animateurs influents qui ont votre oreille et qui géraient jadis le scala,
· l’ancien patron du projet capitale culturelle,
· et une vice présidente chargée de la lecture publique,
on s’interroge et des malveillants, dont je ne suis pas, n’hésitent pas à parler de véritable salmigondis…
Ce que je déduis de la lecture de vos propos dans la presse ce sont des annonces qui ne sont pas les fruits des ateliers ni des cafés culturels, point n’était besoin, disent certains, de procéder à cette mobilisation de six mois pour évoquer un opéra dans le no mans land le long du Rhin
Ce que certains déduisent aussi c’est la mise en place d’une politique directive, qui tendrait à imposer aux acteurs culturels des politiques artistiques qui ne sont pas forcément les leurs.
Le politique, l’élu, est là pour servir la culture et non pas pour imposer ses propres choix ni sa vision politique.
Je veux citer André Malraux qui a toujours été mon maître à penser lorsqu’il lançait un jour à l’Assemblée : « Grands dieux que surtout l’état ne se mêle de rien en matière de création artistique »
Je constate à la lecture de vos directives culturelles que nous avons des conceptions assez opposées. De notre coté le respect et le service des acteurs de la vie culturelle, de votre coté une certaine directivité.
Je terminerai par cette idée qui pourrait traverser l’esprit de certains d’une culture qu’ils pourraient qualifier d’élitiste et qui s’opposerait à une culture pour tous, une culture du peuple.
Bien évidemment les deux conceptions se nourrissent l’une l’autre et c’est parce qu’il y a l’excellence que la culture populaire peut rayonner.
A ce propos je regrette que vos obligations et celle de la quasi totalité de votre état major culturel ne vous aient pas permis, hier, de vivre le concert de l’Orchestre d’Harmonie Caecilia, orchestre amateur qui a une fois de plus comme toutes les années réuni 2000 spectateurs tous des « vrais gens » comme on dit. Nicole Dreyer qui vous a représenté pourra vous en parler.
En conclusion, s’il n’y avait pas vos annonces directives qui en matière de culture peuvent sembler inquiétantes et qui ne sont pas issues des réflexions des assises, comme l’opéra ou votre vision du spectacle vivant, on pourrait faire le constat que concernant ces assises la montagne a accouché d’un courant d’air.
Commentaires
La jeunesse de Strasbourg semble être complètement oubliée. Strasbourg a un opéra, un Zenith tout neuf. Comment rendre tout cela accessible ?
Comment proposer aux jeunes des choses pour eux.
Quand je parle de jeunes je ne parle pas des enfants car eux sont assez gâtés (le vaisseau, le tjp etc...)