Je suis heureux aujourd’hui de vous présenter le programme de la « Bibliothèque idéale ».

La précédente édition, qui s’était déroulée à l’Aubette l’an passé, avait rencontré un succès inestimable.

Je ne veux pas simplement parler de l’affluence du public qui était venu en masse découvrir les écrivains invités.

Je veux parler de ce qui s’était réellement passé, quelque chose de très rare et d’infiniment précieux : des rencontres. De vraies rencontres entre les écrivains et les Strasbourgeois, entre les œuvres et les lecteurs. Il y avait souvent même comme des moments de grâce : quelques souvenirs me restent à l’esprit, comme la rencontre avec Christian Bobin ou la soirée de clôture avec Serge Rezvani…

Nous étions, il me semble, au cœur de la littérature, de l’amour des mots et de l’amour des livres.

Et c’est cela qui n’est pas évident à réussir.

Je me souviens qu’au début de notre mandat, alors que nous réfléchissions à des événements qui puissent redonner au livre sa juste place dans la vie culturelle strasbourgeoise, on nous avait conseillé, de monter un « salon du Livre », comme il en existe dans bien d’autres villes de France.

On aurait donc fait comme partout ailleurs. On aurait pris des écrivains. Et puis comme nous sommes à Strasbourg, on aurait pris de grands écrivains : le dernier récipiendaire du Goncourt, le dernier jet-setter à la mode ou la dernière lauréate du Loft (qui trouve que 26 ans c’est vraiment le bon âge pour écrire ses mémoires).

On aurait mis assis tout ce beau monde à des tables et on aurait dissimulés ces illustres auteurs derrière des piles de livres…

L’enjeu consistant à estimer d’un seul regard quelle pile de livres diminue le plus vite et quel écrivain est en train de s’assoupir derrière la montagne de ses invendus…

Je crois qu’à Strasbourg nous aimons trop les livres, nous aimons trop la littérature, nous aimons trop les écrivains - et les subjonctifs imparfaits - pour que nous optassions pour cela.

Nous aimons tellement les livres que Strasbourg est, en passe, de devenir l’une des toutes premières villes de France pour l’accès aux livres et à toutes les formes du savoir, puisqu’avec la nouvelle médiathèque de la Meinau, avec la nouvelle médiathèque Sud à Illkirch, avec les deux futures médiathèques Nord et Ouest à Schiltigheim et à Lingolsheim, sans parler évidemment de la grande médiathèque de la presqu’ile Malraux ni d’autres projets plus modestes mais pas moins importants comme le futur centre culturel du Neuhof au carrefour Reuss, avec tout cela, quelque chose est en train de se préparer : une ville où le livre se répand d’autant plus vite et d’autant plus largement qu’on y a facilement accès…

Le livre, qui est le plus court, le plus aisé, le plus démocratique accès à la culture, est aussi, peut-être, le plus bouleversant vecteur d’idées et d’émotions.

 

Nous n’avons pas souhaité organiser ici, à Strasbourg, un salon du Livre comme il en existe ailleurs. Nous avons fait un autre choix, en privilégiant avant toute autre chose la rencontre avec les écrivains et avec leurs œuvres.

Cela a commencé, en partenariat avec la librairie Kléber, avec les Conversations à Strasbourg, qui elles aussi ont connu un véritable succès. Elles ont évolué et se sont transformées pour aboutir aujourd’hui à la « Bibliothèque idéale ».

Pendant dix jours, du jeudi 20 septembre au dimanche 30, nous invitons les Strasbourgeois à passer du temps avec des écrivains.

Non seulement à les rencontrer, mais surtout à entrer dans leur monde respectif et à se constituer, à travers ces échanges, leur propre bibliothèque idéale.

L’un des grands livres de critique d’art de Malraux demeure Le Musée imaginaire, que Gallimard, cher François, a eu raison de faire entrer il y a tout juste un ou deux ans dans la Pléïade.

Ce que nous voulons faire ici à travers cet événement, ce n’est pas à proprement parler un musée imaginaire, mais cela y ressemble… C’est une bibliothèque intime, celle que chacun d’entre nous a à l’esprit, avec toute la diversité de ce qui peut la composer, ses grandes œuvres et ses romans de gare, son paradis et son enfer.

Nous avons donc invité des écrivains, en leur demandant d’inviter à leur tour des créateurs, d’autres écrivains, des comédiens, des cinéastes, des philosophes, des artistes, avec lesquels ils souhaitent continuer ou engager le dialogue.

Le principe est tiré du titre d’un roman de Goethe : les affinités électives. Et, au total, ce sont plus de cent personnes qui interviendront au cours de ces journées.

Goethe confessait, dans une lettre à Eckermann, qu’il considérait les Affinités électives comme son « roman le plus subtil ». Ce sont ses propres termes et l’on ne peut pas douter de cette confession de celui qui, venant à Strasbourg étudier le droit rate un cursus juridique qui aurait fait de lui un excellent Rechtsanwalt, mais découvre et la littérature et l’amour…

Oui, en venant à Strasbourg, par le hasard des rencontres et de la vie, Goethe écrivit l’un de ses premiers textes (De l’architecture - c’était à propos de la Cathédrale) et il tomba dans le même temps amoureux de Frédérique Brion - un amour qui reste inscrit à jamais dans la Weltlitteratur, la littérature mondiale, comme une chevauchée passionnée dans la plaine qui s’étend de Strasbourg à Sessenheim…

L’amour et la littérature, l’amour de la littérature, c’est, bel et bien, sous ses auspices tout à la fois goethéennes et strasbourgeoises que nous voulons placer cette deuxième édition de la Bibliothèque idéale.


Voici le programme détaiilé de ce véritable festival