Pour moi cette expo, cette soirée de remise des prix, fut un vrai moment de bonheur. L'art est réellement un antidote à la fatigue du quotidien. Je me réjouis d'avoir arbitré, dans mon agenda surchargé, en faveur de ce moment privilégié de contact avec la communauté artistique.

Quelques extraits du discours d'ouverture de l'expo et de la remise des prix:

"Ce n’est au fond pas un hasard si la première manifestation qui, après sa naissance en octobre 1987, concrétisa l’existence du CEAAC, fut l’hommage rendu par la remise d’un prix à un grand artiste de notre région, le peintre Gérard Haug.

Les arts plastiques ont longtemps tardé à bénéficier en Alsace de l’attention dont jouissaient la musique et le théâtre : il s’ensuivit que de fortes et originales personnalités créatrices ne bénéficiaient que d’une notoriété confidentielle, restreinte à la communauté artistique locale et à un cercle assez réduit de collectionneurs et d’amateurs.

La promotion de l’art d’aujourd’hui ne pouvait bien sûr se limiter à la réparation – fatalement tardive et peut-être toujours incomplète ? – des oublis, des injustices et dès 1988, à côté des prix récompensant des créateurs « confirmés » par  un travail développé sur plusieurs décennies, deux bourses furent aussi remises à des plasticiens plus jeunes.

Sur la vingtaine de dossiers que notre comité a examinés et dont la plus grande partie présentaient des démarches d’une réelle qualité, un accord s’est assez rapidement établi pour l’attribution :

  • de la Bourse de la Région Alsace à Séverine HUBARD ;
  • de la Bourse du Conseil général du Bas-Rhin à Pierre FILLIQUET
  • et de la Bourse de la Ville de Strasbourg à Yoav ROSSANO.

Bien que cette sélection se soit faite uniquement en fonction de l’originalité et de la valeur de travaux individuels, l’exposition collective qui en résulte n’en revêt pas moins certains caractères significatifs.

Une distribution s’est ainsi faite d’elle-même entre ces trois disciplines traditionnelles que sont la sculpture, la peinture et depuis un siècle, la photographie, prouvant ainsi qu’à côté de la performance et des nouvelles technologies, ces arts conservent pour les jeunes créateurs un réel potentiel d’invention et d’expression.

Cela se manifeste pour chacun de nos lauréats par une profonde inventivité exercée dans la réalisation technique des œuvres : si, par exemple, des moyens informatiques sont utilisés au cours de telle ou telle phase du travail, ceux-ci font désormais tellement partie de l’outillage actuel qu’ils n’ont même plus à apparaître dans la forme de l’œuvre achevée.

C’est le cas notamment le cas chez Yoav Rossano, dans son renouvellement de la peinture sous-verre, mais aussi chez Séverine Hubard dont la sculpture noue un rapport vivant, mobile entre l’architecture et le dessin. 

Le second trait voisin que je relèverai chez ces trois artistes serait la place qu’ils réservent à une présence vivante de l’humain dans leurs œuvres. 

Les paysages déserts de Pierre Filliquetsemblent, par leurs lumières, faire signe à notre regard pour qu’il discerne en eux le passage - ou l’éclipse temporaire -  des êtres vivants.

Les constructions de Séverine Hubard invitent à imaginer la main et le coup d’œil qui, les ayant assemblées, pourraient tout aussi bien les réagencer différemment.

Et les surfaces luisantes des peintures de Yoav Rossano invitent le reflet de notre présence à se mêler au dialogue qu’entretiennent les motifs de ses images et celles-ci entre elles." (...)