Célébration de la lecture publique.
Par Robert Grossmann le samedi, 30 septembre 2006, 14:05 - archives-discours - Lien permanent
Si jamais il ne devait y avoir quune seule justification à lexercice de responsabilités publiques, je crois que ce serait celle-ci : pouvoir un jour inaugurer une bibliothèque...Aujourdhui, dans le sud de la Communauté urbaine, à Illkirch-Graffenstaden, nous y sommes.
Et jéprouve un vrai plaisir, de la fierté, pourquoi ne pas le dire ? et, en même temps, beaucoup démotion, à être aujourdhui avec vous pour ouvrir officiellement cette nouvelle bibliothèque-médiathèque Sud de la Communauté Urbaine de Strasbourg.
Car je sais quici, dans les semaines, dans les mois, dans les années qui viennent, de la passion va naître, des émotions vont poindre, des rires vont éclore : tout ce qui constitue notre vie humaine et qui en est le sel va se révéler plus intensément à chacun de ceux qui viendront fréquenter ces lieux.
Pour y atteindre je forme le vu que de nombreux chemin conduisent vers ce nouveau lieu, des chemins quemprunteront des jeunes au sortir de lécole, du collège, du lycée, des adultes après leur journée de travail, des gens de toute sorte, des gens inattendus, de ceux, aussi, qui ne savent pas ce quest une bibliothèque-médiathèque.
Pourquoi mes collègues maires et conseillers de la CUS ont-ils de manière tout à fait innovante voulu cette politique de lecture publique au niveau de lagglomération ?
Jen évoquerai les raisons mais je veux commencer par la plus claire et la moins évidente : conduire vers le mot, vers la phrase, vers le texte ceux qui ne les fréquentent guère ou, pire, ceux pour qui ils sont étrangers sinon adverses.
Lillettrisme est trop important et trop grave dans notre société pour que nous ne nous en préoccupions pas aux cotés de l'état qui a la compétence avec le ministère de léducation.
On peut hélas citer beaucoup de chiffres inquiétants
Cest ainsi que lon évalue à 10 à 12 % la population en France qui a des difficultés avec la lecture. Cest énorme au XXI ème siècle !
Un autre chiffre :
en 2000 sur 1724 élèves de classe de seconde 27,95% ont obtenu zéro en dictée,
en 2004 sur 2300 élèves 56,4% ont obtenu zéro soit une progression de 28,45 %
Voilà un élément grave de la fracture sociale.
Le but de la bibliothèque publique nest pas dapprendre à lire, encore que chez les tout petits .
Il est en revanche de susciter du désir, et de faire en sorte que ce désir soit en croissance incessante.
Je verrais bien inscrit sur le frontispice de ce lieu de culture de notre Communauté Urbaine la phrase qui est inscrite au frontispice du Palais de Chaillot, cette phrase de Paul Valéry et qui vaut pour tout lieu de culture
« Il dépend de celui qui passe
Que je sois tombe ou trésor
Que je parle ou me taise
Ceci ne tient quà toi
Ami nentre pas sans désir. »
Le chemin de la bibliothèque est une voie intime et royale en même temps, qui conduit vers une rencontre un peu mystérieuse, vers une révélation.
La lecture, cest ce moment intime qui peut donner à notre vie un sens, changer des destinées, inventer des mondes imaginaires, frotter sa cervelle, comme laurait dit Montaigne en sa librairie personnelle, aux plus grands esprits de lhumanité.
De Sophocle et dEschylle à Marc Lévy et Amélie Nothomb . je cite les deux derniers car ils étaient hier à Strasbourg, pour cette manifestation exceptionnelle quest la Bibliothèque idéale, à lAubette . les écrivains nous invitent à vivre plus intensément notre vie, ils nous apportent ce que certains peuvent considérer comme rébarbatif mais dont on sait que cest avant tout de lamour et de la passion, ils nous apportent de la « culture ».
Comment ne pas dire
, ici, dans lagglomération, qui a vu, avec Gutenberg, le livre moderne naître, comment ne pas dire tout ce que nous apporte le livre.Cest le moyen le plus populaire et le plus démocratique, pour avoir accès à la culture. Et cet accès, cet accès aux plus hautes uvres de lesprit humain, à ce qui nous touche dans notre cur et bouleverse chacune de nos vies, nous voulons, ici, à la Communauté urbaine, le répandre et le propager, le démocratiser.
Je peux parler dexpérience et je ne peux pas ne pas me souvenir quayant écrit moi aussi, je sais que le livre parle au cur. Et une de mes fiertés, pardon de le dire ainsi, aura été davoir recueilli personnellement ces témoignages nombreux, de lémotion que provoque la lecture, grâce à une comtesse Robertsauvienne dont le père dirigeait les fameux atelier dIllkirch Graffestaden .
Mais je suis, avant tout, un lecteur. Un lecteur passionné, un lecteur impénitent. Et cette passion, je voudrais quelle soit contagieuse, quelle se diffuse à toutes et à tous. Cette passion intime, je voudrais la partager.
Je noublie pas que nos bibliothèques sont aussi des médiathèques et que la musique, limage et les films auront aussi une place de choix ici.
Il y a tant à dire sur les spécificités respectives de limage et du texte.
Je ne souhaite voir ici et aujourdhui quune réelle complémentarité et que limage conduise vers le texte. Goethe disait « Le mot et limage sont deux corrélations qui se cherchent éternellement »
Goethe aujourdhui devant le petit écran, lordinateur et la toile, ne dirait sans doute pas mieux ni plus.
Mes chers collègues, jai la conviction profonde que nous faisons ensemble uvre utile.
Aujourdhui, ce bâtiment de la Médiathèque Sud en est la preuve tangible.
Car, linauguration de cette Msud nest que la première!
Elle en annonce dautres: la bibliothèque-médiathèque Ouest à Lingolsheim, la grande médiathèque communautaire Austerlitz à Strasbourg, la médiathèque Nord à Schiltigheim.
Nous avons accompli, à la Communauté urbaine, avec Fabienne Keller, avec lensemble des maires, et Jacques BIGOT y a pris sa part, une sorte de révolution culturelle au cours des dernières années.
Une révolution culturelle bien pacifique, mais qui place notre Communauté urbaine à lavant-garde de toutes ses homologues françaises : à Strasbourg et à la CUS, nous sommes en effet les seuls en France à avoir fait passer la compétence « lecture publique », qui est traditionnellement une compétence municipale au niveau communautaire.
- Je tiens à remercier lEtat pour son incitation et sa contribution.
Je veux remercie le Conseil Général dont la lecture publique est une compétence officielle pour les communes de moins de mille habitants.
- Je remercie tous les maires qui ont depuis longtemps des bibliothèques de proximité chez eux et ceux qui en développent le projet.
- Je veux aussi mettre laccent sur notre volonté de mettre en place un réseau qui reliera toutes le bibliothèques-médiathèques qui existent dans la communauté urbaine grâce à un Pass Bibliothèque unique en France et qui est en train de prendre forme.
Oui, il sagit là dune décision éminemment politique, une décision qui a du sens.
Il sagit aussi dun défi que nous relevons aujourdhui tous ensemble.
Jamais, en aussi peu de temps quaujourdhui, cest-à-dire en un seul mandat, autant de bibliothèques et de médiathèques auront été mises en chantier sur lensemble de notre agglomération. Cest une prouesse.
Que serait une bibliothèque sans bibliothécaires ?
Je tiens à saluer les nôtres, tous ensemble pour leur engagement.
Saluer de manière Marie Jeanne Poisson qui sest beaucoup investi avec ses collègues.
Nous avons décidé de passer à une nouvelle étape de la construction de notre politique de lecture publique et avec Fabienne Keller présidente déléguée et maire de Strasbourg, avec André Thomas directeur général des services, je rencontrerais dans les toutes prochaines semaines lensemble des personnels des bibliothèques pour les entendre et leur faire part de notre volonté inébranlable de monter en puissance dans notre projet.
Ils ne men voudront pas de citer ici une très belle phrase que jai trouvé dans « Eloge de la lecture » de Michèle Petit qui parle de cette démocratisation de la lecture que nous mettons en place à la Communauté Urbaine de Strasbourg.
Elle cite un jeune dont elle précise quil nest pas un grand lecteur :
« Ce que jaimerais, dit ce jeune, cest que le bibliothécaire ait du temps pour se consacrer à ce qui est de lordre de la vie, tout ce qui touche la vie. Plutôt que dêtre un conservateur de livres, être un magicien qui nous emmène dans des livres, dans des mondes »
Je sais que cest cette volonté dêtre des magiciens qui vous anime toutes et tous !
Je tiens maintenant à remercier les services de la Communauté urbaine, ici les services de la ville dIllkirch, les architectes, toutes celles et ceux qui ont pris part à ce beau projet, de sêtre mobilisés ainsi.
Grâce à eux, grâce à vous, et aussi un peu grâce à nous, nous allons faire de la Communauté urbaine lune des toutes premières agglomérations de France en matière de lecture publique.
Au Sud, au Nord, à lOuest et au cur de notre agglomération, nos concitoyens auront un accès direct à toutes les formes de culture et de savoirs. Je men réjouis. Je me réjouis, avec vous, des découvertes et des engouements à venir, de ces moments irremplaçables qui vont naître et surgir dans lesprit des lecteurs.
A la Communauté urbaine de Strasbourg, avec lensemble des maires qui la composent, avec Fabienne Keller, avec vous, Jacques Bigot, nous avions un rêve commun, un rêve qui transcendait tous les clivages, nous rêvions de donner accès au plus grand nombre à la lecture.
Aujourdhui, le rêve devient réalité. Puisse la Bibliothèque Médiathèque Sud, la M Sud, devenir une fabrique à rêves !
Commentaires
Il était temps de dépoussiérer les bibliothèques de la ville et ses environs !
Vous l'avez fait. Bravo !
Voilà une excellente façon de soutenir et d'encourager les bibliothécaires. Strasbourg va peut- être pouvoir rattraper son retard sur les services offerts aux habitants ? Cf. Lyon, Orléans, Bordeaux... : www.culture.fr/Groups/bib...
Les bibliothèques se développent enfin pour le plus grand bien de la population.
".. servir la ville ou se servir de la ville... that are the questions! ... "
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Vous avez raison, et bon courage pour votre energie a developper Strasbourg :
Il merite d'avoir des bibliotheques plus celebres-meme que celle de Napoleon au chateau de Compiegne..
Mais gare a quelques uns qui, tout en etant payes par notre ville pour servir ses elus et ses citoyens, en profitent pour commettre des abus gravement domageables, en abusant de votre confiance, meme contre des gens qui essayent d'y developper des activites ajoutant a son rayonnement le plus large et qui ont soutenu votre action des le debut de la bataille electorale.
Parfois, de tels "sousmarins" font plus de mal que mille enemis declares, sauf si l'on repare le mal fait avant que ca ne provoque des domages irreversibles.
Raison de plus pour que vous perseverez, en redoublant d'energie, a creer des projets positifs.
Vos discours sur votre action en faveur de la lecture publique au moins, ce n'est pas du flan ! Quel bel équipement que cette "MSud". Et cela me laisse rêveuse quant à la suite... "MNord", "MOuest", "MEst" et "GrandeM". Continuez à agir pour notre ville avec cette singularité qui vous va si bien.
Votre politique de lecture publique est avant-gardiste. Existe-t-il beaucoup d'agglomérations qui ont fait de ce sujet une compétence communautaire ? Je n'en suis pas si sûr... En tout cas il faut persévérer. À quand le "multipass bibliothèque" ? Strasbourg est une ville de culture et de lettres, une ville de la pensée. Tout ce qui peut contribuer à la conforter dans ce rôle est bon. Pourquoi ne pas installer un "déclamoir" place Kléber et y faire lire pas des comédiens des chefs d'oeuvre de la littérature ? En tout cas continuez et allez encore plus loin. Comme vous l'avez déjà dit, je crois, la culture coûte cher mais le manque de culture encore plus.
Juste un mot pour vous féliciter pour vos initiatives couronnées de succès, et pour vous souhaiter un joyeux anniversaire.