Extraits :

Edgar Morin (…) la volonté de classer (gauche –droite) règne sur notre temps. Je n’ai jamais utilisé l’expression « la gauche » au singulier.(…) je me sens de gauche, parce que j’aspire à la fraternité et que j’essaie de résister à la barbarie humaine.

Commentaire  : moi aussi j’aspire à un monde de fraternité et je suis contre toute barbarie. Dois je être de gauche pour autant ou alors, parce que je ne me revendique pas de gauche, la fraternité et la lutte contre la barbarie me seraient-elles interdites ? Serait-ce le monopole, la chasse gardée de la gauche ?

Régis Debray : dans la vie on n’est pas « ceci ou cela » mais « ceci et cela ». (…) Ce qui ne tient plus la route depuis que la gauche officielle a épousé le capitalisme libéral, c’est le complexe de supériorité, l’identification à la morale, au camps du bien, à la vérité. Le scientifique et le généreux contre le rapiat et le superstitieux : ce manichéisme peut maintenant faire sourire.(…) surtout quand ceux qui vous traitent de réactionnaire ont incorporé les valeurs du marché et de l’individualisme le plus rapace.

Commentaire  : Bien vu, on s’attend maintenant à ce que dans ce débat la notion sanctuarisée de « gauche » soit réellement désacralisée et que l’on accepte l'idée certes trop élémentaire et terre à terre pour de grands intellectuels que nous marchons tous sur deux pieds. Jadis, dans certain milieu alors partagé par la nation tout entière, c’était même au rythme « de gauche-droite », pas cadencé !

Les deux, Régis Debray et Edgar Morin : … je me sens toujours de gauche.

Commentaire : Ah bon ! Moi aussi, à cette sauce là. Pourtant rien ne colle plus aujourd'hui, ni les classements gauche droite, ni les valeurs du XIXième siècle et de Zola, les temps ont changé, les contextes aussi. Le constat est établi, mais pas question d’être autre chose que de gauche ! Curieuse conclusion au débat…

Décidément, peut-on encore être autre chose que gauche? 

Les valeurs classiques de la droite, honorables et présentables, seraient maintenant revendiquées et portées par la gauche. Et, à les entendre tous, la pensée, l’intelligence, la culture seraient définitivement confisquées, otages d’intellectuels qui, (par TOC?), ne peuvent être ailleurs qu’à gauche.

Mais, foin d’hypocrisie : tout cela n'est qu'une pure question de sémantique

Des décennies de militantisme intellectuel et journalistique – devrait-on dire de terrorisme intellectuel ? - ont réussi à créer en France la "bien-pensance-unique" qui n’est autre chose que leur « sémantiquement correct ».

Il reste ce mot de Régis Debray qui atténue le raisonnement général et qui a failli me consoler : Dans la vie on est ceci et cela, pas ceci ou cela.

Mais, la bien-pensance me rattrape, je fais pénitence et je rectifie : on peut-être ceci de gauche ou cela de gauche , mais difficilement autre chose que de gauche ! Voilà qui serait correct, politiquement correct !

Post Scriptum et soulagement définitif : A Strasbourg où je l'ai rencontré l'année dernière Régis m'a confirmé qu'il était avant tout gaulliste. Je recommande d'ailleurs la lecture de son superbe "A demain de Gaulle".  Donc c'est bien "ceci et cela" qu'il faut retenir de tout cela et de tout ceci!