Paris doit comprendre que le soleil se lève à l’est du coté de l’Europe de Strasbourg.

Une longue et usante guéguerre se poursuit contre Strasbourg.

En cause : le confort de mesdames et messieurs les parlementaires européens. Rien que des raisons matérielles. Les trajets seraient usants pour rejoindre la ville siège du Parlement. Ils le sont sans doute.

Mais on produit aussi des arguments plus présentables : le coût financier de deux sièges, Bruxelles et Strasbourg, les déménagements récurrents de dossiers et de fonctionnaires.

Il faut en finir avec Strasbourg argumente un lobby de plus en plus puissant, entraîné avec la maestria qu’on leur connaît par les Anglais.

Eux luttent sans merci, sans scrupule. Un député devant qui j’évoquais Churchill en 1947 sur les rives du Rhin me répliqua cyniquement et avec un rire gras, autour du petit déjeuner que le maire offrait à la délégation anglaise : « C’était l’époque où la France devait être gouvernée par Londres… » Ce propos de table reflèterait-il l’image de la France qu’ils cultivent au fond d’eux même.?

Aucun merci donc…C’est anti-français et anti-Strasbourg.

La grossièreté en moins, d’autres députés d’autres pays européens embrassent la cause anglo-saxonne en faveur de Bruxelles.

Dans certains cénacles, inspirés et animés par les mêmes, on phosphore sur un produit de substitution à donner Strasbourg…Pourquoi pas un institut universitaire de technologie européen à la place du Parlement ?

Comment en est-on arrivé là ? Faisons quelques constats élémentaires.

Strasbourg est une ville de province, Bruxelles et une capitale d’Etat !

Bruxelles a un aéroport important, celui de Strasbourg est de petit gabarit.

Bruxelles est à une heure vingt minutes de Paris en train Thalis.

Strasbourg Bruxelles se fait en quatre heures et demi.

En avion, les liaisons sont incertaines et le coût du billet prohibitif.

Le secrétariat du Parlement est installé à Bruxelles avec le gros de l’administration, et partiellement à Luxembourg.

La Commission européenne est, elle aussi, à Bruxelles.

Le désavantage pour Strasbourg semble patent.

Mais cette situation perdure depuis au moins quatre décennies et aucune réelle amélioration n’a jamais été apportée ; au contraire, le delta s’est élargi au fil des ans.

Il faut aujourd’hui faire le constat que Strasbourg, capitale régionale, n’a jamais bénéficié du soutien fort et adapté qu’il lui fallait de la part de l’Etat français pour être pleinement la capitale européenne de la France. Bruxelles a derrière elle le pays tout entier dont elle est capitale.

L’affaire du TGV est à cet égard révélatrice.

Voilà donc un moyen de transport rapide et confortable qui aurait permis de rejoindre Paris et ses aéroports en moins de deux heures. Au regard du rôle européen de Strasbourg, le TGV devait bel et bien constituer une priorité absolue pour la France.

Qu’a fait le pouvoir central et ses gouvernements variés et successifs ? Après l’avoir accordé gracieusement à Lyon, Marseille, Nantes, Lille, la France a décidé de le réaliser vers l’Est avec vingt ans de retard et moyennant une très lourde taxation financière. Ce que les autres villes de province ont obtenu, Strasbourg a été obligée de le mendier puis de l’acheter très cher.

Comment donc avons-nous été défendus par les représentants de l’Alsace à Paris au long de ces années ? Les élus du Midi, de la Bretagne et du Nord se sont vu attribuer des équipements que les Alsaciens n’ont pas été capables d’obtenir. Ce qui est vrai pour le TGV l’est aussi pour les liaisons routière rapides. Le Grand Contournement Ouest est à l’ordre du jour depuis trente ans, de même que la VLIO : à ce jour rien n’est réalisé. Aucun projet d’aéroport de taille réellement internationale n’a été possible pour Strasbourg.

Il est bien tard aujourd’hui, mais il n’est pas trop tard !

Paris, disons en clair les gouvernants qui y siègent, doit enfin prendre conscience que ce qui est en cause c’est la position de la France en Europe.

Il faut évidemment surmonter le fâcheux effet du référendum où l’on a voté « non » pour des raisons essentiellement de politique intérieure.

La France est européenne ! La défense active de Strasbourg doit donc constituer une priorité absolue car Strasbourg n’est rien d’autre qu’une grande cause nationale. Il faut que cesse cette situation inadmissiblement française fondée sur le « hors de Paris point de salut ! »

La modernisation de la France passe par une authentique décentralisation et la promotion de Strasbourg l’Européenne est une occasion de démontrer magistralement une telle volonté d’épouser son siècle et... son Europe.

Il faut développer une offensive puissante !

Que convient-il de faire concrètement ?

  1. Manifester de manière forte que Paris veut être rapidement reliée au cœur de l’Europe et accélérer la liaison TGV Paris-Budapest en passant par Strasbourg et donc desservir le siège du Parlement européen.
  2. Organiser les liaisons aériennes strasbourgeoises, de telle sorte qu’elles soient régulières et connectées aux grandes capitales européennes.
  3. Mettre en place une liaison aisée par rail et air entre Bruxelles et Strasbourg
  4. Exiger avec force qu’une partie importante de l’administration du Parlement européen s’installe à demeure à Strasbourg.

Le contrat « capitale européenne », obtenu il y a un quart de siècle par Pierre Pflimlin, ne suffit plus aujourd’hui dans l’Europe des vingt cinq. Il n’est qu’une manière pour Paris de s’acheter une bonne conscience minimale....même s'il convient de reconnaître que celui que nosu venons de négocier est largement plus avantageux que les précédents et pour la première fois le mot "capitale européenne" y figure

Mais, la France doit mettre le paquet !

Dans la guéguerre actuelle, la facilité consisterait à fermer les yeux, à céder, à capituler ! Le vent du confort émollient inciterait à une telle attitude.

On a le droit aussi, et sans doute le devoir, d’engager des combats difficiles.

La sagesse populaire veut que l’on ne perde que les combats que l’on ne mène pas.

Ici à Strasbourg, nous ne souhaitons plus nous contenter de camper sur des lignes de défense.

Nous voulons être offensifs en faveur de l’Europe de Strasbourg, la seule qui ait un sens aux yeux de l’histoire et pour l'avenir.

Rien n’est gagné, mais rien n’est définitivement perdu.