La France malade de son cancer juridique
Par Robert Grossmann le vendredi, 17 mars 2006, 17:10 - politique - Lien permanent
Janvier 2006 la France malade de son cancer juridique
Elles prolifèrent, elles galopent, elles se superposent, elles se complètent
ou se contrarient, s'annulent ou se détruisent mais elles ne s'arrêtent pas,
les lois françaises. « Voici mon bilan, exposait ce sénateur à ses grands
électeurs : en neuf années de mandat, j'ai contribué à l'élaboration de 76 textes de lois. Moi à 112
disait son colistier. Ils en étaient légitimement fiers puisqu'ils se
situent dans le cadre de cet incurable sport national vicié par le dopage de
la compétition. Qui en fera plus et qui fera mieux ?
C'est ce qui débouche sur l'inextricable maquis juridique qui étouffe notre
pays et l'empêche de respirer simplement, sainement !
Il y a tant de textes à respecter qui souvent se chevauchent lorsque des
élus décident de réaliser un projet que l'on peut se demander si la conséquence de tout cela n'aboutit pas à faire du sur place.
La transformation de la place de la gare de Strasbourg pour accueillir le
TGV doit pas faire l'objet de trois enquêtes publiques. Innombrables sont
les contraintes de tous ordres. Les opposants politiques et les obsédés du tribunal s'en donnent à coeur joie.
Les lois leur offrent toutes les possibilités de recours. On ne peut plus, aujourd'hui, agir dans le cadre de responsabilités publiques que conseillé par une pléiade d'avocats.
C'est un toilettage général de tous les codes qu'il faut entreprendre
d'urgence. Il faut simplifier l'appareil législatif de la France. La force
du code civil originel résidait dans la volonté de Napoléon d'avoir un
instrument juridique clair, efficace et opérationnel.
Simplifier, réformer, élaguer, clarifier, harmoniser notre appareil
législatif...Si j'avais été parlementaire j'aurais accordé une priorité
absolue à ce chantier. C'est quasiment du salut public.
J'ai entendu à la télé ce juge expérimenté rappeler que les résolutions
fortes évoquées en ce moment à propos de la sale affaire du procès d'Outreau
l'avaient déjà été de la même manière il y a une vingtaine d¹années lors de
l'affaire de la Vologne et du petit Grégory.
Fabriquant incontinent de lois de tous ordres notre pays ne semble plus
capable de se réformer sainement ni de prendre les bonnes dispositions pour
progresser.
Si je suis pour la rupture, ne voilà une raison et je ne vois aujourd¹hui,
objectivement que Nicolas Sarkozy disposer de l¹énergie, de le volonté et du
courage pour l¹entreprendre et la réaliser.
Si je suis pour la rupture, envoilà une raison claire et je ne vois aujourd'hui,
que Nicolas Sarkozy disposer de l'énergie, de la volonté et du
courage nécessaires pour l'entreprendre et la réaliser.
Commentaires
Désolé de vous contredire concernant Nicolas Sarkozy, mais, demain, nous fêterons les trois ans de la LOPSI (amis lecteurs, pour couronner le tout, les infâmes juristes que vous êtes obligés de vous coltiner parlent en sigles incompréhensibles pour bien vous faire sentir qu'ils en savent plus que vous). Cette loi est fort sympathique, mais, pour autant, la police intervient-elle davantage dans les halls d'immeuble? Non car elle est jugée sur son ratio intervention/élucidation ou suites judiciaires. Pas d'intervention aléatoire, pas de réception de plainte pour des choses "intéressantes", pas de mauvaises stats... Une loi pour quoi faire, là encore?
De plus, vous parliez de Nicolas Sarkozy, mais vous oubliez Jean-Louis Debré, qui, comme Philippe Séguin avant lui, s'est élevé contre le trop-plein de lois. Je vous rappellerai aussi qu'aujourd'hui, la provenance des lois est majoritairement de deux ordres: la transposition de la législation communautaire, et les projets de loi, d'origine gouvernementale, dans un gouvernement où figure, avec rang de ministre d'Etat, un certain Nicolas Sarkozy...
Pour en revenir au fond du propos, je suis évidemment d'accord avec vous. J'ai pour ma part une proposition à formuler: que les textes essentiels de notre droit soient reconnus, et que les modifications ultérieures ne viennent que consolider le texte initial sans créer de niches particulières. En France, plutôt que de pouvoir se contenter de la grande loi incrémentée au fur et à mesure, on doit voir si les décrets, voire les circulaires ou arrêtés (!!) n'introduisent pas des subtilités byzantines, car, souvent, les textes d'application ne sont pas des compléments mais des obstacles à la pleine application de la loi votée par le Parlement. En contrepoint des libertés prises par le pouvoir réglementaire, les "cavaliers législatifs" ne choquent personne (ou presque, cf. l'affaire du tram de Strasbourg...), aussi les parlementaires peuvent voter des dispositions en toute opacité. Pour ne prendre qu'un seul exemple, la prorogation du délai de définition de l'intérêt communautaire du 13 août 2005 au 17 août 2006 a été établie par... la loi d'orientation sur l'énergie du 13 juillet 2005. Logique...
Mais vous avez raison, c'est le grand bazar.
Moi, j'suis simplement subjugué par la constante mise à jour du Blog de RG, President de la CUS. D'autres propriétaires de Blog bien moins actifs dans leur vie professionnelle n'en font pas le quart !
Respect et Bravo vraiment.... à moins qu'il y ait quelques "nègres" se chargant d'y mettre le contenu ? mais je n'ose y croire.
Ascendant cancer !
« Dura lex, sed lex » ! Ce prologue proclamé, on peut alors suivre vos propose sur la loi et les règlements, mais pas trop, car sinon, nous tomberions dans une dérive « populiste » que vous dénoncez.
Plus sérieusement, vous avez raison et la complexité des lois, règlements, jurisprudence, à laquelle se rajoute la couche européenne, fait effectivement que le juridisme pourrait être un des blocages français avec aussi les couches administratives et les collectivités locales.
Ainsi, comment ne pas penser à nos 36.000 communes, quaucun gouvernement nosera jamais remettre en cause. Il me semble ainsi que la France aurait autant de communes, à elle seule que le reste de lEurope.
Au juridisme, sajoutent ici poids et coûts des structures. Etat, régions, départements, pays, communautés, communes , là aussi, il y aurait un travail pour des parlementaires (dans votre « si javais été », faut-il voir votre candidature dans la 1ère . Je pense que pourtant vous pourriez être élu dans une autre ).
La problématique est quil ny a pas sarkophilie comprise de véritable simplification en France et tout se finit en manifs et consensus, un mot qui commence bien mal et qui illustre lincapacité de la France à oser se reformer avant quil ne soit trop tard.
En attendant, je bois un verre à vos projets ....
La judiciarisation de notre vie quotidienne et un phénomène constant de notre société. Un accident, un problème avec un voisin, une dispute avec sa femme, et on fait appel à un avocat. Le recours de plus en plus fréquent à la justice et le signe avancé de lindividualisme dans notre société.
A présent, même le débat politique se termine lui aussi devant les tribunaux. Les oppositions font retarder des projets ou les stoppent (le nouveau stade de Football de Lille par exemple) à des fins politiques et contre lintérêt général.
Malheureusement les tribunaux sont composés dHommes et de Femmes qui ne sont pas forcément neutres ou apolitiques. Le juge Halphen, le juge Jean Pierre ou le juge Bigot en sont les parfaits exemples.
Cela pose donc le problème de la légitimité des uns et des autres. Un juge (avec ses opinions personnelles) peut-il statuer sur la pertinence dun projet voté par les représentants du peuple même si celui si répond à lensemble des règles établies par le parlement ? La cour administrative dappel de Nancy répond NON. Des associations opposantes disent OUI
Un juge est-il au-dessus des élus ? Les élus sont-ils au-dessus des juges ? En ce début de 21ème siècle la question de la séparation des pouvoirs se pose à nouveau sauf quil ne faut plus compter uniquement le législatif, lexécutif et le judiciaire. Il faut également intégrer les médias et ses sondages qui contribuent à la prise dune décision ou non.
Pour en revenir à la question du trop plein législatif, la volonté du Général de Gaulle de mettre fin à limmobilisme du pays généré par les partis politiques à vécu.
La 4ème République (qui produisait déjà énormément de normes) et ses maux, sont de retour. Les questions de la prise et de la conservation du pouvoir prévalent sur lintérêt général du pays. Les petits arrangements, la corruption, les alliances de circonstance, la démagogie, le clientélisme, limmobilisme sont réapparus en force en 1981 (avènement de lun des leaders de la 4ème République) et sont à leur apogée depuis lélection de Jacques Chirac.
La rupture souhaitée par Nicoals Sarkozy, doit saccompagner dune rupture dans nos pratiques Républicaines, dans une redéfinitions de la séparation des pouvoirs et dans un renouvellement des pratiques Politiques.
Porthos du Vallon veut bien entendu parler du juge Burgaud et non pas de l'excellent avocat-maire d'Illkirch Bigot ?
Comme "Steph_l_expatrie" je suis subjuguée par le soin que M. Grossmann met à renouveler le contenu du site et à répondre aux blogueuses et blogueurs. Avec son aptitude qu'on lui (re)connaît à distribuer des coups de pieds dans les fourmilières, est-ce que le président de la Cus n'est pas en train d'inventer une vraie i-démocratie, assez éloignée de ce que les autres hommes politiques font d'habitude ? En tous les cas, chapeau pour cette belle initiative et je souhaite que vous continuiez à consacrer du temps à votre blog... Par rapport aux autres villes en France, nous sommes un peu des privilégiés : nous pouvons librement dialoguer avec notre élu ! Merci à vous.
Concernant le pouvoir des juges, il est surtout ce que la société veut qu'il soit. La loi est "l'expression de la volonté générale", selon la formule du grand professeur Raymond Carré de Malberg. Le juge ne saurait s'y opposer de front, tout au plus a-t-il un pouvoir d'inflexion.
Aucun système n'est parfait, et surtout pas le système judiciaire. La norme suprême elle-même est imparfaitement défendue: dans notre système semi-kelsénien de contrôle de constitutionnalité des lois, qui contrôle le contrôleur, le Conseil Constitutionnel? Cet organe, ouvertement politisé en France et actuellement dominé par la droite, a pourtant la confiance des parlementaires d'opposition, et n'hésite pas à déclarer inconstitutionnelles des lois d'inspiration gouvernementale...
Je ne crois pas qu'à grande échelle l'on puisse parler de juges rouges ou de juges réacs. Il y en a, tout le monde peut en citer, mais évitons la généralisation démagogique. Pour plagier le député Santini, je dirais qu'il y a deux catégories de juges, ceux qui rendent la justice sous un chêne et ceux qui la rendent comme un gland. Et, pour les seconds, la couleur politique ne fait rien à l'affaire...
Je pensais à Mme Josiane Bigot vice-présidente du TGI de Strasbourg et ancienne juge pour enfants.
En dehors de la question des juges, cette politisation se pose aussi pour ladministration ministérielle dont de nombreux ministres ont déjà souligné la lourdeur. Linamovibilité des hauts fonctionnaires contraste avec les successions des gouvernements et nous fait réfléchir sur la maîtrise réelle du pouvoir. Qui tient les manettes ? Qui décide et propose réellement ?
Les institutions françaises sont plutôt bonnes par rapport à celles de certains de nos voisins mais les USA ont par exemple une spécificité qui me semble intéressante. Les hauts fonctionnaires y changent lors de chaque alternance. Cela permet à chaque citoyen dêtre certain que la politique pour laquelle il a voté, soit réellement engagée. Cela permet aussi aux élus de travailler en toute confiance avec des hommes fidèles et loyaux envers le pouvoir et déviter les polémiques habituelles de "chasses aux sorcières" qui réapparaissent lors de chaque alternance en France.
Vous évoquez le spoil system. Ce besoin de confiance du politique dans ses collaborateurs n'est-il pas satisfait par le développement des emplois fonctionnels dans l'administration? Concernant l'inamovibilité réelle ou, plus sûrement, supposée, des hauts fonctionnaires, je m'interroge: ceux-ci n'ont-ils pas des supérieurs hiérarchiques, les ministres? Si un ministre est infichu de s'imposer, c'est son problème.
C'est d'ailleurs une grande qualité de Nicolas Sarkozy: il est l'un des rares ministres de ces dernières années à avoir pris la mesure de sa fonction.
Je me suis souvent posé la question de la nécessité du "spoil system" en France. Cela aurait le mérite d'éviter les cris horrifiés lorsqu'un élu fait le ménage en prenant une collectivité. Au-delà des élus, la gestion globale d'une structure est une travail d'équipe, donc, effectivement, le "spoil system" aurait le mérite de clarifier les choses, sauf qu'avec le statut français des fonctionnaires, il est quasi-impossible à mettre en place en france.
Les élus passent, les fonctionnaires restent ... Voilà sans doute ce qui donne également l'impression, par delà l'énarchie, que les politiques sont les mêmes de gauche à droite.
Ce sentiment conforte le "tous pareils, tous ...." et renforce le rejet du politique.
Ohhh quel sujet s'il en est pour un juriste!!!
Merci cher Robert Grossmann de l'avoir lancé. Au début de mes études de droit, j'avoue avoir été fasciné par cette culture parallèle qu'est le droit...On les voyaient nos professeurs, pétris dans leurs beaux costumes professer les articles du Code Civil comme autant d'évangiles. Les juristes parlent entre eux un dialecte incompréhensible pour le commun des mortels et c'est une partie du problème. La bataille d'un citoyen non éclairé de savoir juridique contre une administration X ou Y, devient la prise de Carthage...Et les français de dire "Delenda est Cartago", et les parlementaires de rajouter une couche de textes supplémentaire en invoquant le "Nemo Censetur Ignoravit Legem"! A observer tout ceci, on pourrait presque croire que l'homme politique s'abrite derrière des lois qu'il a inspirées afin de se placer au-dessus de ses concitoyens. En réalité, on nous enseigne que la loi est sacrée. et je pense que les personnes amenées à de hautes fonctions politiques comme nos députés ou sénateurs ont le besoin de s'associer à cette sacralité. Donner son nom à une loi, quoi de plus grisant si ce n'est le sourire d'une jolie femme? La simplification de textes existants c'est déjà moins valorisant, mais ô combien utile!
Je lisais encore récemment que le Médiateur de la République traite une pile croissante de dossiers chaque année, victime de son succès mais surtout victime de ce que vous appelez le "cancer juridique"!
Sur le fond je partage totalement votre avis de nécessaire allègement des codes de tous ordres et je vous en citerais même un qui fait figure d'exemple de labyrinthe même pour les juristes : le Code de l'Urbanisme. Car ce dernier, majoritairement alimenté par la jurisprudence, est donc d'autant plus épais. En bref faisons table rase! Ne laissons pas les codes devenir nos livres de chevets!
Je compare toujours le juriste à un médecin. Le "patient" doit voir un spécialiste car il est utopique de penser qu'il pourra se défendre lui-même (et tout est fait pour l'en dissuader d'ailleurs), y compris dans des litiges qui ne nécessitent pas le recours à un avocat. Voyez aussi comme fleurissent les assurances juridiques de tous ordres (dois-je préciser que cela pèse encore plus sur nos élus dont la responsabilité pénale peut être recherchée pour de nombreuses raisons, non fondées parfois....)! Nicolas Sarkozy est peut être la réponse à ce laisser aller "juridicisant" mais il ne devrait pas être le seul. Les parlementaires doivent en prendre conscience, le droit n'est pas uniquement un fond de commerce ou un instrument de gloriole personnelle, c'est aussi un contrat social. Je remets entre les mains de nos parlementaires une partie de mon pouvoir personnel afin de vivre sereinement.
Autre point qu'il est bon d'aborder dans ce sujet et que vous n'évoquez pas : la jungle de textes favorisent aussi ce que j'appelle la débrouillardise juridique! Comment cumuler différents avantages en se basant sur divers textes et donc comment profiter de l'empathie administrative et légale?
Robert Grossmann a raison de parler de "cancer juridique". Le doyen Georges Vedel parlait déjà, en 1992, d'"enflure du droit" pour dénoncer l'excès galopant de réglementations et de textes, l'entrecroisement et les contradictions entre le droit national et le droit communautaire.
Le doyen Vedel rappelait également cet article 1 du Code Civil : "Nul n'est censé ignorer la loi". Cela signifie que nul ne peut arguer de son ignorance de la loi pour sa défense. Cela implique aussi que la loi doit rester parfaitement intelligible aux citoyens. Nous en sommes très loin !
Qu'espérer ? Un toilettage général du droit français ? Evidemment. Mais je suis réellement très pessimiste sur une telle perspective. Que pourrait-il se passer ? On confierait à une commission ou à un groupe d'experts la rédaction d'un rapport. Ce dernier serait, bien sûr, excellent. Quelques juristes le liraient. Mais aucun gouvernant n'aurait l'idée saugrenu de le mettre en oeuvre. Cela sert souvent, à cela, un rapport en France : à se donner bonne conscience, quand il faudrait se donner les moyens d'agir.
Pour AlsacienDadoption: quelque chose me dérange dans vos propos. Certes, moi aussi j'approuve Vedel ou Carbonnier, et autres aigles juridiques. Moi aussi, je l'ai écrit plus haut, je suis partisan d'une clarification du droit, au sens "mise en cohérence".
Mais j'ai un peu l'impression que vous confondez clarification et pasteurisation du droit. A vous lire, le droit serait, en vrac: un instrument d'oppression du bas peuple qui n'y comprend rien, un outil de gloriole pour parlementaire en mal de reconnaissance, un labyrinthe alimenté par la jurisprudence.
Pour sortir de ce problème, c'est finalement simple. Tombons dans la facilité d'une société bushiste et manichéenne, avec les gentils et les méchants, l'acquittement et la peine de mort, la liberté absolue ou l'interdiction absolue. Faisons voter les lois soit à l'unanimité des personnes assujetties (version rousseauiste), soit par un obscur comité secret (version Hardy-LO), histoire que personne ne se pousse jamais du col.
Et surtout, supprimons la jurisprudence, déconnectons le droit de la réalité et appliquons mécaniquement le droit; d'ailleurs, dans ces conditions, nous pourrions remplacer les juges par des distributeurs automatiques de jugement (M. Bur sera d'accord, puisque les jugements des tribunaux français sont imbuvables et ne tombent pas sous le coup de la loi de l'article 30 de la loi du 9 août 2004 sur la santé publique).
Je force naturellement le trait, ne le prenez pas mal. Mais je crains qu'à grands coups de latinismes vous ne soyiez pas loin de tomber dans l'excès inverse. C'est le travail législatif qui doit être réformé, et le contenant du droit, non nécessairement son contenu! Notre monde est complexe, il est illusoire de réduire ses règles de fonctionnement à des fiches prémâchées au nom de grands principes à la mode.
J'ai même envie de vous dire que vous vous trompez partiellement sur la complexité du droit pour nos concitoyens. Personnellement, j'ai beaucoup de plaisir à travailler avec le code de l'urbanisme. Certes, j'ai la formation nécessaire; mais la pratique professionnelle du droit n'est pas l'université Robert-Schuman! Le code de l'urbanisme au quotidien ce n'est pas une thèse sur "l'approche épistémologique de la garde du chien dans les villes hanséatiques au XIVe siècle", c'est aussi, souvent, le bon sens appuyé par des textes. Pratiquer l'urbanisme c'est aussi étudier un plan, lire un règlement concret, aller au besoin sur place. Cela, n'importe qui peut le faire. Les procédures sont complexes mais avec de la pratique on s'en sort; pour le reste, les professionnels sont nécessaires, oui.
Une dernière remarque: vous vouliez sans doute parler d'"apathie"?
Cher Roméo,
Merci de vos excellentes remarques, cela alimente le débat comme le souhaite Robert Grossmann. Toutefois vous prévenez que vous grossissez le trait, je vous rétorque que je l'ai grossi également. Je ne le prends pas mal du tout bien au contraire! J'ai même beaucoup ri en lisant l'expression des "distributeurs automatiques de jugement", votre esprit est très fin. Vous aimez le droit de l'urbanisme, je vous félicite. Moi je ne l'aime pas mais c'est une question de goût après tout? Il n'était nullement question dans mes propos de supprimer la jurisprudence bien au contraire, mais plutôt d'en alléger le contenu, de la rendre plus claire. Car vous n'êtes peut être pas d'accord parce que vous avez reçu la formation appropriée, mais que pensent selon vous la majorité des français de notre droit, ont-ils encore confiance dans la justice de leur pays, dans les règles qui doivent les protéger ou bien les mettre en garde? Je ne crois pas hélas et la surenchère de textes n'améliorera pas cet état de fait...Bien au contraire, il y aura une parfaite dégradation. Combien de temps faut-il aujourd'hui pour ériger un bâtiment public d'intérêt général? Trop longtemps malheureusement : entre les espèces à sauvegarder sur le terrain choisi, les possibles trésors archéologiques, les révisions des documents d'urbanisme si nécessaires et bien entendu les délais de recours des personnes ayant intérêt à agir, cela devient ubuesque! Je ne m'étonne pas du tout que le mandat de 6 ans pour un Maire soit même trop court aujourd'hui, c'est quasiment un minimum pour faire sortir de terre une idée. Car ce ne sont pas nos élus qui ne réfléchissent pas assez vite, mais la machine derrière qui peine, embourbée dans des textes et des procédures toutes plus complexes les unes que les autres. En y ajoutant la dimension d'erreur humaine, on tutoie l'"apathie" cher Roméo. Vous me direz, tant que le droit sera si élaboré, Julien Courbet aura des sujets pour son émission et Jean Pierre Pernaut également car n'oublions pas que le temps c'est de l'argent!
Pour la jurisprudence, peut-être pourrait-on s'inspirer des arrêts de la Cour de Justice des Communautés Européennes: c'est long comme un jour sans pain mais tout y est, expliqué, décortiqué. J'y reviens: virer des normes, du contenu n'est pas une fin en soi, sauf pour ce qui est vraiment doublonnant ou périmé; là, oui, il faut dégraisser le mammouth. Pour prendre un exemple absurde: si je ne m'abuse, en droit local subsiste une loi de 1886, écrite en allemand gothique, qui réprime... le blasphème!
C'est l'architecture normative qui est d'abord en cause. Pour rester concret, encore récemment, la loi du 20 juillet 2005 a soumis les concessions d'aménagement à des procédures de publicité et de mise en concurrence, conformément à la réglementation communautaire. Cela a-t-il été codifié au CGCT? Hé non, c'est prioritairement dans le code de l'urbanisme! Pour couronner le tout, les modalités pratiques de passation dépendent d'un décret... toujours pas paru, ce qui oblige les collectivités concédantes à se reporter au droit communautaire pour savoir ce qu'elles doivent faire.
Au risque de me répéter: la priorité n'est pas d'alléger le droit lui-même mais de redéfinir ses processus d'adoption, de restructurer l'architecture normative, de remettre de l'ordre dans les législations.
Un point que vous commenciez à soulever à juste titre: dans le cadre des législations connexes à prendre en compte dans un permis de construire, d'authentiques aberrations demeurent. L'Architecte des Bâtiments de France est souvent un seigneur féodal, en droit de prescrire n'importe quelle mesure de son imagination lorsqu'il n'interdit pas purement et simplement un projet parce qu'à titre personnel cela n'est pas à son goût.
Par contre, et j'en terminerai là, les émissions que vous citez me rassurent malgré leur poujadisme larvé, car elles signifient en creux que les juristes et les gestionnaires sont utiles à la société, et qu'il y a une demande... Ayant encore un nombre conséquent d'années de travail à effectuer avant, éventuellement, de toucher une retraite, je m'en félicite!! :-)
Oh, je crois que, dans ce thème, nous avons complètement oublié de parler de quelqu'un, qui contribue actuellement, au nom de sentiments louables, à casser les pieds à tout le monde et à faire de notre société une salle pour enfants-bulle. C'est un député alsacien, qui est résolu à rattacher son nom à toutes les mesures rabat-joie possibles et imaginables au nom de la santé publique.
Les fumeurs sont en sursis, mais pour l'instant en réchappent, par contre, il a réussi à supprimer le goûter dans les collèges et les lycées. Ce député, je le surnomme le Docteur Wonka, vous savez, le père du chocolatier Willy Wonka dans "Charlie et la Chocolaterie", qui est... chirurgien-dentiste, comme lui. Vous voyez de qui je parle? Mais bon, au-delà de sa personne, c'est le dogmatisme et la non-prise en compte du réel qui effraie.