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Robert Grossmann, « UMP libre », prend du champ

imagesRobert Grossmann, président de la Communauté urbaine de Strasbourg de 2001 à 2008, ne participera pas à la prochaine compétition municipale. Il m'avait confirmé, en septembre dernier, une décision qui murissait depuis mars 2011, dit-il. Connaissant le personnage, cette décision n'a pas dû être facile à prendre. La rupture spectaculaire avec Fabienne Keller entre les deux tours des municipales 2008 a beaucoup pesé, mais peut-être moins que "l'inexorable délitement" de son parti, qui a connu plusieurs appellations depuis l'UNR (Union pour une nouvelle République) et dont le dernier avatar s'appelle l'UMP...

56 ans de fidélité au gaullisme

Après "56 années de fidélité au gaullisme", celui qui, à l'époque où il présidait  l'UJP (Union des jeunes pour le progrès), avait mis en selle Nicolas Sarkozy, ce que l'ancien président de la République a toujours attesté sans pour autant lui en marquer particulièrement reconnaissance, exprime non pas sa fatigue, mais son ras-le-bol. Il souffrait et souffre toujours des dérives d'un mouvement tellement englué dans les rivalités intestines, les querelles d'ego de ses dirigeants et les manoeuvres politiciennes de bas étage qu'il n'arrive même pas à profiter de l'effondrement dans les sondages du président et des gouvernants socialistes.

49 années de mandat municipal, dont sept comme "maire délégué" et président de la CUS, 30 ans au conseil général du Bas-Rhin, 12 années comme vice-président du conseil régional, des rencontres avec le général De Gaulle et André Malraux, des relations plus que formelles avec Georges Pompidou, Jacques Chirac, Jacques Chaban-Delmas, entre autres, une empreinte forte laissée dans le paysage strasbourgeois, avec le Zénith, le Rhénus Sport, la médiathèque Malraux et la salle Hans Arp/Sophie Tauber à l'Aubette pour ne citer que quatre des réalisations les plus emblématiques, le bilan de Robert Grossmann n'est pas mince. Avec ses qualités de tribun, il aurait sans doute fait un bon député si les circonstances avaient été autres et si… l'animosité constante d'André Bord ne lui avait mis des bâtons dans les roues.

La confidence du curé de la Robertsau

Robert Grossmann se retire sur son Aventin (*), mais il n'en devient pas muet pour autant. Il continuera à s'exprimer avec d'autant plus de liberté qu'il n'a plus à ménager personne, ce qui n'a d'ailleurs jamais été dans ses habitudes. Et, en matière de talent d'écriture, il n'a plus rien à prouver non plus. Soutiendra-t-il une tête de liste aux municipales ? La confidence du curé de la Robertsau qu'il a rapportée à l'Express de cette semaine - "Jamais on ne pardonnera à Fabienne Keller son vote en faveur du mariage homo" - laisse penser que ce n'est pas son ancienne co-équipière du tandem qui aura ses faveurs. Mais ce n'est pas vraiment un scoop.

C.K.

(*) Le Mont Aventin est l'une des sept collines de Rome sur laquelle le peuple romain, menaçant de faire sécession, se retira en 494 avant J.C., jusqu'à ce qu'il obtienne le droit d'élire les tribuns.

Sa lettre

Voici le texte dans lequel Robert Grossmann annonce qu'il ne briguera pas de nouveau mandat:

"Je viens d’entrer dans ma 73ème année. J’ai pris la décision de ne pas participer à la prochaine compétition municipale. Je ne briguerai pas un neuvième mandat municipal. Je me retire sur mon Aventin d’où je compte faire entendre ma voix, je serai un observateur attentif et actif de notre vie politique.

 Ma décision était quasiment prise pour des raisons politiques en mars 2011 lorsqu’en bureau départemental, je m’étais déclaré « UMP-LIBRE », en désaccord avec les évolutions de mon parti. Elle a été renforcée en juillet 2011 pour des raisons personnelles.

 Dans la vie publique comme dans tous les domaines je suis attaché à la droiture, j’abhorre les mensonges et les hypocrisies. Je suis adepte de la parole libre et vraie. Je l’ai pratiquée au risque de déplaire. C’est en toute sérénité que je m’exprimerai dorénavant mais avec une liberté d’autant plus ardente qu’elle est issue de la synthèse de mon parcours.

 Strasbourg, « ma ville », celle qui m’a vu naître, où j’ai fait mes études, où j’ai développé « ma vie », que j’ai servie et que j’aime de manière immodérée restera toujours ma passion tout comme mon Alsace que j’ai défendue et célébrée dans mes ouvrages. Dans mes engagements et l’exercice des responsabilités, j’ai privilégié l’action. Mon bilan en atteste, il est visible, il est concret, il constitue ma vérité et ma fierté.

 Je reste indéfectiblement fidèle aux messages et à l’héritage intellectuel et politique du général de Gaulle et j’ai toujours privilégié la dimension sociale du gaullisme.

 Pour Strasbourg et les Strasbourgeois, je souhaite le meilleur maire possible par delà les clivages partisans."