Oui à une collectivité unique en Alsace.

Je veux d’abord saluer le courage, la ténacité et l’habileté du ministre, président dans cette salutaire entreprise de création d’un Conseil d’Alsace.

Nous attendons tous une simplification des structures administratives de la France pour soulager le volume et les couches du mille feuille.

 

Mais il sera permis d’émettre quelques éléments d’analyse sur le document qui a été rendu public à la veille du Congrès du 1er décembre.

Mais pas sans les grandes villes

Je n’entrerais pas dans une tentante analyse du document,  paragraphe par paragraphe.Je veux juste extraire, à titre d’exemple, un élément, à savoir la volonté de mettre en place une coordination en matière d’organisation du transport. Comme presque toutes les autres propositions stratégiques elle concerne évidemment au premier chef les populations urbaines.

Cela conduit à souligner, dans l’ensemble du document et donc du projet,une faille difficile à comprendre : l’absence de toute référence à la Communauté Urbaine de Strasbourg, 455.00 habitants et à la Communauté de Communes de Mulhouse, 252.OOO habitants soit, ensemble, près de la moitié des habitants de la région, (1.837.000).

Les experts prévoient qu’au XXIème siècle 80% de la population française vivra en territoire urbain. Une telle prédiction n’est pas impossible. Dès lors, comment a-t-on pu faire l’impasse, dans ce grand projet porté par le ministre président Richert, sur les territoires urbains ?

Par quelle raison a-t-on oublié d’associer les représentants des grandes agglomérations à ce projet alors qu’elles en sont au cœur ?

Les communautés urbaines : territoires pertinents

Dans toutes mes démarches de président des Communautés Urbaines de France en 2007 j’avais défendu les territoires des grandes agglomérations comme étant les plus pertinents pour y exercer des blocs de compétences généraux. Je cite, à titre d’exemple, l’aménagement du territoire, l’environnement, le transport et bien d’autres secteurs de la vie de nos concitoyens.

Un bon aménagement du territoire ne peut ignorer ces espaces où sont concentrées des charges de centralité et des équipements sociaux, culturels, commerciaux, sportifs qui concernent évidemment la population de toute la région.

Je maintiens que les Communautés Urbaines et les grandes Villes constituent LES territoires pertinents pour la gestion des grandes questions qui concernent au plus près leurs habitants. Elles sont des collectivités de proximité

Je constate que le projet de conseil d’Alsace les ignore alors qu’il fallait non seulement les mentionner, mais les associer.

Naturellement il ne viendrait à l’idée de personne d’imaginer que ce serait parce qu’elles sont à gauche, alors que la Région est à droite, qu’elles auraient été occultées.

Certes j’aurais préféré être encore au pilotage de la CUS, mais ce que je défendais hier je ne peux l’oublier et le rejeter aujourd’hui, c’est une question d’honnêteté intellectuelle et politique.

 

L’acte 2 de la décentralisation loi du 13 aout 2004 prévoyait la possibilité d’une rencontre des exécutifs de la région, à la quelle, naturellement la participation des grandes agglomérations était prévue.

Je dois toujours à l’honnêteté de dire que le Conseil Régional, lorsqu’il était présidé par un « ami politique » de la même obédience que le président de la CUS, n’a jamais tenu à mettre cette disposition en vigueur et, par delà les clivages politiques, j’ai toujours pu observer une sorte de très regrettable et injustifiée méfiance de la part des élus de la campagne à l’égard de la ville centre. Pourtant une évidente solidarité lie les uns aux autres. Les uns ont besoin des autres et d’ailleurs, contrairement à ce qui se passe au niveau des  élus, l’interdépendance est vécue au quotidien par la population, par ce qu’on appelle parfois les « vrais gens », pour qui toutes ces querelles sont totalement étrangères.

La CUS doit devenir Métropole

D’ailleurs, comme l’a évoqué mon collègue Jean Emmanuel Robert au conseil municipal de Strasbourg et comme il le fera ici, nous devons profiter de ce grand moment qu’initie la Région Alsace pour aller officiellement vers la création d’une métropole comme le permet la loi du 16 décembre 2010. Je vous le demande monsieur le président et ne pas le faire, retarder cet événement, serait pénalisant pour notre CUS car cela nous empêcherait qu’elle s’approprie toute une série de compétences aujourd’hui exercées par le département.

Annoncer dès maintenant les économies que produira le Conseil d’Alsace

Les vraies et bonnes intentions de la Région et des deux départements sont claires et elles sous tendent la révolution qu’ils sont en train de mettre en œuvre : réaliser des économies …économies d’échelles, économies de personnel, économies de présidences, économies d’exécutifs, économies financières évidemment. Les électeurs attendent ces économies et il serait bon que dès à présent ces économies soient énumérées, annoncées et chiffrées.

Je reviens vers le document qui va être débattu en Congrès le 1er décembre et je consulte la partie concernant la gouvernance.

Il ne pourrait sembler confus que si on ne le lis pas trois ou quatre fois. J’aimerais que l’on me détrompe si je déduisais que l’annonce de conseils de territoires, de pôles de projets et de pôles de compétences semblerait indiquer que les conseils généraux perdureraient sous une autre appellation, donc que dans les faits, rien ne changerait.

Mais, surtout, je note ce paragraphe qui, lui, nous concerne très directement : « L’organisation territoriale du Conseil d’Alsace est multipolaire entre Strasbourg et Colmar. Les sièges de l’Assemblée et de l’Exécutif peuvent être répartis entre les deux chefs-lieux. Cette organisation veillera au renforcement du rôle politique et administratif de Mulhouse. »

La multipolarité ainsi prévue est une régression et, pour Strasbourg, un affaiblissement. Nous ne sommes plus au temps du Saint Empire qui se distingua en Alsace par un enchevêtrement de baronnies de seigneuries, de féodalités, de terres épiscopales au milieu des terres laïques qui faisaient alors une incroyable et inextricable mosaïque.

Nous ne sommes plus au temps de Louis XIV qui avait installé le Conseil souverain d’Alsace, une juridiction et non une gouvernance, à Colmar en 1698 après qu’il le fut à Brisach.

Nous ne sommes plus non plus à l’époque de la décapole dont on sait quel était l’objectif.

Ne pas affaiblir Strasbourg

Nous sommes à l’ère de l’Union Européenne et l’Europe a une ville capitale, siège de ses institutions et de son parlement, menacé comme on sait. Et si la Région s’y met aussi elle se tire une balle dans le pied. Il ne semble pas raisonnable de mettre en œuvre une multipolarité officielle qui affaiblirait Strasbourg en lui enlevant son statut de capitale de l’Alsace. Strasbourg est capitale de l’Europe tout comme elle est capitale du Haut-Rhin aussi bien que du Bas-Rhin. Elle est capitale de l’Alsace !

Je veux ici saluer le geste du Président de la République qui a honoré Strasbourg en y faisant tenir hier le sommet France-Allemagne-Italie au moment même où l’on projette de contester à Strasbourg son rang de capitale de région.

Que des organismes régionaux de proximité soient installé à Colmar, Mulhouse, Haguenau, rien n’est plus logique ni plus normal, mais créer une multipolarité officielle n’a aujourd’hui qu’un seul sens : le dépouillement de Strasbourg et son affaiblissement.

C’est quoi cette histoire d’impérialisme de Strasbourg ?

Où serait donc cet impérialisme strasbourgeois dont parlent certains? Pourquoi Colmar pâtirait-elle du fait que Strasbourg continue à accueillir le siège du Conseil d’Alsace, et finalement à conserver ce qu’elle a dores et déjà ?

Le futur Conseil d’Alsace ne peut être porté sur des fonds baptismaux amputé de sa capitale. Aussi je demande au ministre-président Philippe Richert de prendre en considération Strasbourg, de ne pas lui porter atteinte et en ce sens je propose que la motion votée par le conseil municipal de Strasbourg soit votée en solennellement en conseil de Communauté urbaine.