MAMCS 6 novembre 1998
Par Robert Grossmann le jeudi, 2 février 2006, 17:12 - archives-discours - Lien permanent
Discours à loccasion de louverture du musée dart moderne et contemporain de Strasbourg 6 novembre 1998
On ma souvent parlé de ce discours en m'en réclamant le texte.
Je représentais ce 6 novembre 1998 le conseil régional en ma qualité de vice président chargé de la culture.
Le public présent sy était intéressé peut-être parce que les orateurs précédents avaient été longs et un peu fatigants à écouter, que leur ton était monocorde et docte. Dans mon introduction je me suis exonéré publiquement de saluer les nombreuses personnalités présentes, qui lavaient été déjà à trois reprises. On men a su gré et cette impasse me permit dêtre bien accueilli. J'y ai aussi exprimé des convictions. Je terminais enfin assez rapidement, avec un peu dhumour
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La volonté de créer ce musée, haut lieu de la contemporanéité, avait un sens.Elle signifiait que Strasbourg et lAlsace navaient jamais été des rêveuses alanguies le long des rives du Rhin, se contentant de contempler le cours des événements.
Cette volonté sest manifestée fortement en 1987 par léquipe de Marcel Rudloff qui a voulu ainsi projeter Strasbourg vers son avenir lorsquelle a pris la décision, avec Roland Recht, de créer ce musée en procédant au choix de léquipe darchitectes dAdrien Fainsilber.
Cet engagement nétait pas le fait du hasard et le courant en faveur de la création avait été lancé par le Maire Marcel Rudloff avec Musica en 1983, puis avec le Centre Européen dActions Artistiques Contemporaines en 1987.
Tout en restant fidèle à lhistoire riche, complexe et douloureuse, de notre Alsace qui a forgé nos valeurs et notre constante quête déquilibre, notre sagesse en un mot, nous avons voulu, par ce musée, dire clairement la capacité de création de cette ville et de cette région.
Cest pourquoi, représentant officiellement le président du conseil régional, Adrien Zeller, je me réjouis que ce projet nait pas été abandonné et je tiens à rendre hommage à madame Catherine Trautmann de sêtre toujours engagée en sa faveur.
Ce Musée est à mon sens unique en France et peut-être en Europe par la confrontation quil propose, la complémentarité quil suggère et la confluence quil offre. Voilà une belle et singulière leçon dhistoire de lart permettant de déambuler de 1870 à nos jours.
Demblée je voudrais livrer ici une problématique qui minterpelle.
Cest celle du rapport de lHistoire à lhistoire de lart. De 1870 à nos jours, le parcours du musée réussit-il, malgré sa vocation universelle, à suggérer la situation de lAlsace ballottée dans la brutalité cinq fois en 70 ans entre la France et lAllemagne?
Peut-être cette question est-elle ici totalement saugrenue mais jy vois une passionnante étude à réaliser en partant de litinéraire de ce musée et qui pourrait être « le parcours de lart suggère-t-il le parcours de lHistoire? »
Dentrée Gustave Doré commence à nous enchanter pour nous conduire à travers la section moderne de ce musée qui est surprenante par sa richesse et passionnante par la diversité de ses écoles et de ses uvres.
Jai finalement bien aimé laccrochage du Bonnard, cher Monsieur Rappetti, et vos récents achats se sont parfaitement intégré à la collection pour mieux lanimer encore.
Je parlais de complémentarité et je suis impressionné par la qualité et le nombre des photos présentées, voilà une autre originalité de ce musée.
Tout comme la section « arts graphiques » qui est impressionnante par la qualité des uvres proposées.
Et soudain le choc, jallais dire le dérangement, de lart daujourdhui avec tous les questionnements quil impose. Bertrand Lavier à lhonneur ici, ma chambre à la Krutenau de Sarkis, Le Cigare de Panamarenko prêté par le FRAC-Alsace, il fallait bien que je le souligne! et dautres oeuvres ou installations qui peuvent être perturbantes, aux côté de toiles historiques comme le Baselitz du début des années 60 ou le Schoenebeck .
Voilà lengagement radical de nos conservateurs.
Je veux redire combien le dialogue entre la section historique et la section contemporaine est surprenant, pédagogique, et particulièrement riche en fin de compte.
Le Musée de Strasbourg permet au visiteur dêtre confronté à luvre, à létonnante puissance de luvre... luvre qui sollicite lémotion, luvre qui bouleverse, luvre qui interpelle, luvre qui désoriente, luvre qui irrite.
Si elle provoque le plus souvent des moments de jubilation, comment pourrais je ne pas songer quelle débusque aussi en lhomme dautres instincts.
Luvre dont la force immobile libère parfois lhostilité des frustes.
Nest-il pas singulier de constater quau moment où certains régimes consolidaient des camps pour un définitif enfermement, ils pendaient en un même mouvement à dindignes cimaises des uvres prémonitoires pour les qualifier de dégénérées.
Luvre dart constitue un signal, parfois une alarme et nous ne loublions pas aujourdhui.
Je suis heureux aussi de pouvoir rappeler que presque toutes les dernières acquisitions ont été faites avec le concours de la Région Alsace qui, au sein du FRAM collabore et cofinance avec lÉtat. Ce nest pas un cofinancement muet, nest-ce pas Monsieur Rapetti, il y a des débats et cest très salubre.
Mais quelle belle initiative vous avez prise en présentant la restauration in vivo si jose dire du Christ quittant le prétoire. Le Christ opéré, soigné, pansé, rétabli par les artistes micro-chirurgiens de la restauration cest encore une fois tout à fait inédit.
Comme mon temps de parole est proportionnel à la subvention de la Région, seulement 20 millions, mais 20 millions tout de même, il me faut conclure et je forme donc le vux que la richesse artistique de ce musée soit partagée par le plus grand nombre possible de visiteurs .
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