Villepin sur le vif
Par Robert Grossmann le jeudi, 30 mars 2006, 09:37 - mon journal, mes humeurs - Lien permanent
Je roule, retour vers Strasbourg, et de la radio de ma voiture Villepin parle sur Europe 1. Il martèle, sans pitié pour les mots quil frappe avec vigueur. Il cogne sur les accents toniques et même ceux qui ne le sont pas. Cest de la mitraille. Je ressens une pénible impression de violence. Aucun répit, le débit est dun emportement permanent. Le ton, pour moi, s'impose au détriment du sens, qui s'évanouit dans mon esprit. Elkabach fait quelques tentatives pour qualifier poliment ce qui tourmente mes oreilles « quelle conviction ! quelle passion, monsieur le premier ministre! » Pour moi cette passion là se situait à lextrême frontière du cri permanent.
Je nécoute malheureusement plus et je réfléchis sur fond de phonèmes agressifs.
A quel Villepin avons nous à faire ? A celui qui, depuis quil est à Matignon, serre les mains de tous les passants quil croise, secrétaires, manuvres, PDG, tout venant ? A celui qui depuis quelques mois ne cesse de sourire type première de couv de Marie Claire ? A celui qui noue si bien son cache nez, pardon, son foulard cachemire à la manière gravure de mode ? A celui qui montrait son torse et sa crinière sortir de bain ? A un Villepin secret qui serait un authentique et doux poète sensible et généreux mais qui aurait livré subtilement ce jardin secret à la France entière, à grands coup de parutions littéraires ? A celui qui avec un cynisme sans équivalent a conduit Chirac à dissoudre lassemblée sans le moindre sens politique et qui, à une autre occasion, ma dit personnellement :
« les élections cantonales et régionales perdues, cela naura aucune importance, aucune influence, sur le gouvernement et le chef de létat.Ils resteront en place! »
« Et létat de lélectorat ?» lui répliquai-je
« Aucune importance pour le sommet de létat, cela ne changera rien »
Qui est Villepin ? Quels sont ses masques
Enjôleur, mannequin, conseiller diabolique, diplomate, hobereau, premier ministre, poète, écrivain, serreur de mains ??? A quel Villepin puis je donc me fier?
Je réfléchis. Les cris sortis de mon poste minterpellent à nouveau.
La manière de parler, de sexprimer est décidément essentielle.
Lart de la parole (pour éviter le mot aujourdhui suranné déloquence) est un plus difficile quil ny paraît ! Ah si Villepin tentait de rythmer son discours, fort et appuyé à certains moments, puis adouci, peut-être même tendre à dautres, puis rationnel et narratif
Sait-il quil y a des gens qui sont ses « récepteurs », qui écoutent et qui ont aussi des sensibilités ?
Sait-il tout simplement quil existe des gens ?
Dominique : Prends un temps de pose, analyse ton débit et ton style oratoire, analyse toi tout court face au peuple et reviens nous plus modeste et plus humble.
Le destin dun homme politique de premier plan ne peut saccomplir pleinement sil na pas affronté le suffrage du peuple et, pour ma part jajouterais, sil na pas connu léchec et la défaite car ce qui nous intéresse cest de voir comment il se relève et triomphe dautant mieux quil a intégré les leçons de léchec !
Commentaires
Je partage entièrement ce point de vue bien écrit et juste, mais les gens de pouvoir peuvent-ils échapper à l'arrogance ? ils oublient qu'on a jamais que le pouvoir de ceux qui vous écoutent et là bien des gouvernants sont dépassés, hélas !